Lettres à Marie
Arnaud
Bayonne Bordeaux Mexico
(1891)
Parmi divers papiers sauvés de la destruction par Gilbert Arragon bouquiniste de la rue Sainte Catherine à Bayonne, une poignée de lettres datées de 1891.Elles étaient adressées à Gracieuse Marie Arnaud née à
Bayonne le 10 avril 1867,épouse de Jean Pierre Jules Decamps, vétérinaire
militaire.
Les lettres ont été écrites par deux bayonnais :
Le jeune frère de Marie Arnaud,Joseph Jean Baptiste dit Chevalier,
Une amie,Hélène Prosperine Louise Puyo, épouse de Victor Dominique
Eugène Calvet, commerçant exerçant à Mexico.
Bayonne, le 23
mars 1891
Bien chère Marie
Voici ma dernière lettre de France, écrite le jour de mon
faux départ, car il faut que je te dise que je ne pars pas aujourd’hui lundi.
Je ne quitterai Bayonne qu’après demain mercredi pour prendre le vapeur à
Bordeaux vendredi ou samedi au plus tard.
Je suis donc Bayonnais pour deux jours de plus ce qui je
t’assure ne contrarie nullement maman.
Je commence cette semaine comme un véritable noceur. Hier
r nous avons tous dîné chez marraine pour les adieux et aujourd’hui je suis
invité également à dîner chez Lascoutx où Léon * est arrivé samedi pour prendre
15 jours de vacances veut m’avoir une dernière fois. Maintenant je n’ai plus
qu’une visite à faire et quelques petits achats, puis je serai totalement libre.
Merci de ta bonne note et du gentil petit poisson qui va
tout de bon traverser l’océan et faire sur carton plus que nous font peut-être
certains de ces véritables congénères. Dis à Jules que je prends bonne note de
ces bons conseils. Il n’est pas le premier à me faire ces recommandations mais
celles qui me les ont faites jusqu’à présent n’avaient que de belles théories affermies
par aucune expérience.
Ainsi donc une
dernière fois, adieu. Embrasse bien fort Jules pour moi, et pour toi reçois mille
caresses de ton petit américain.
Ch Arnaud
Mamita vous embrasse (..)en attendant le mois de juin.
Adieu.
Complément du blog
Lascoutx Joseph Jean Baptiste Léon Adrien,
médecin militaire (Bayonne 1873-1947)
Hôtel de Bayonne, Bordeaux
le 26 mars 1891
Bien chère Marie
À l’heure où tu liras ces lignes, j’aurai déjà commencé
mon voyage de Bordeaux à Pauillac, peut-être même serai-je déjà livré à la
volonté de Monsieur l’Océan Je quitterai Bordeaux demain matin, vendredi à 8
heures. Papa et Maman pourront venir m’accompagner jusqu’au paquebot qui est de
4500 tonneaux ; tu vois que c’est gentil ; et pour garnir tout cela il n’y
aura que 15 voyageurs, aussi nous pourrons facilement danser le quadrille sur
le pont. J’espère et je désire continuer le voyage aussi bien que nous l’avons
commencé. Nous sommes tous très gais, mangeons chacun pour quatre et dormons tous pour huit. Ce matin nous
sommes sortis avec la pluie, mais cela n’a pas duré longtemps. Papa et moi nous
sommes allés sur les quais pour voir i le mouvement du port et jeter un coup
d’œil sur mon lieu de départ. Depuis le temps est douteux mais pas trop mauvais,
aussi nous sommes déjà allés voir M.Moncousin qui nous a invité à dîner et je
profite pour t’écrire du moment où maman prend le mathé..*
Ainsi donc au revoir. Embrasse Jules pour moi et pour tous
et garde pour toi le dernier baiser que ton frère t’envoie de France .
Adishatz.
Ch Arnaud.
*La mère de Marie et de Chevalier Arnaud,Catherine San Estevan est originaire de Montevideo . Le maté est une boisson sud-américaine
Mexico, le 30 mars
1891
Ma bien chère amie
Vraiment j’ai trop tardé à vous écrire, mais puisque je
reconnais ma faute j’espère que voilà pardonnée et je veux vous assurer que
malgré cela je n’ai cessé de penser à vous un seul instant.
Dans votre lettre
vous me faisiez part des événements qui s’étaient succédé dans votre famille à
ce moment-là : la mort de la pauvre Madame Bégué et le départ de Chevalier.
Vous ne vous doutiez pas alors ma chère amie que son
voyage pour le Chili étant différé c’est à Mexico qu’il irait …
Qu’il se déciderait à quelle famille pour se retrouver
ici avec une amie véritable lion et de futurs amis.
Avouez avec moi que la destinée à des circonstances bizarres….
Alors que tout enfant Chevalier recevait nos caresses et s’attachait à nous
nous étions loin de supposer qu’un jour viendrait où lui et moi quitterions
notre famille pour des régions lointaines !!...
Même quand j’ai quitté Bayonne, je ne croyais pas que
quelques mois plus tard votre frère viendrait me rejoindre.
Chevalier en écrivant la semaine dernière me disait qu’il
voulait aller à Tarbes pour vous annoncer la nouvelle.
J’aurais donné quelque chose pour pouvoir juger de
l’effet qu’aurait produit cette nouvelle sur vous …
Mon cher Victor a reçu aussi une lettre de Monsieur
Arnaud le remerciant d’avoir voulu s’occuper de trouver un emploi pour Chevalier.
C’était inutile, car c’est offert de bon cœur, on ne s’engage pas à s’occuper
de tous les jeunes gens, mais connaissant Chevalier, comme je le connais, mon
mari n’a pas hésité un instant.
Nous avons hâte de savoir s’il a changé d’avis pour s’embarquer.
Victor redoute qu’il ait pris le vapeur Marseille, ce bateau étant spécialement
un navire de marchandises et mettant beaucoup plus de temps pour effectuer ses
voyages. Enfin j’ai hâte de le voir arriver……
Comme vous me le dites Chevalier va faire un grand vide
pour Monsieur et Madame Arnaud ; ce qui atténuera tant soit peu leurs regrets,
c’est la pensée qui sera près de nous
et que quoiqu’il arrive, nous serons là toujours disposés à lui être utile.
Je vais donc avoir de vos nouvelles de vive voix et de
celle de ma famille. _illisible _ne faut-elle ainsi vous accompagner notre cher
voyageur !!....
Excusez-moi ma chère amie si je suis brève aujourd’hui,
mais je une foule de lettres écrire. Du reste j’attends la vôtre avec
impatience et ne perdrai pas une minute pour y répondre.
Rappelez-nous, mon mari et moi au bon souvenir de
Monsieur Decamps, mon Victor vous envoie ses amitiés et moi, ma chère amie en
vous embrassant un millier de fois je vous dis bien à vous.
Hélène
Vous pouvez m’écrire n’importe quel jour, Il y a
constamment des départs. Mettez simplement au-dessus de l’adresse Voie de New
York.
Mexico,2 mai 1891
Bien chère Marie
Vous êtes furieuse contre moi, j’en suis sure et pourtant
je ne suis pas coupable. J’attends tous les jours l’arrivée de Chevalier pour
répondre à votre bonne lettre, le voilà parmi nous depuis jeudi soir et comme
vous le voyez je m’empresse de vous l’annoncer.
Il jouit d’une excellente santé ayant supporté la
traversée comme un vieux marin, je l’ai trouvé tel que je l’ai laissé à Bayonne
voilà bientôt un an !!
Inutile de vous dire si nous avons parlé de vous et de
nos deux familles, nous continueront à le faire, de cette manière l’exil vous paraîtra moins lourd !!.Chevalier fait sa correspondance près de moi, nos
deux lettres vous parviendront ensemble et j’espère que vous répondrez bien
vite.
Comme doit vous le dire votre frère il est placé chez Victor,
cette nouvelle l’a rendu bien heureux et Monsieur et Madame Arnaud qui le
désiraient tant en seront satisfaits, j’en suis sure.
De cette manière Chevalier ne fera pas ses débuts chez
des étrangers chose souvent ennuyeuse pour un jeune homme qui arrive en pays
inconnu.
Nous ferons tout qui dépendra de nous pour qu’il s’habitue
bien vite et nous efforcerons de lui remplacer sa famille absente. Vraiment, il
me parait impossible quelques fois de le voir près de nous, qui l’aurait jamais
cru !!
Vous ne serez point surprise ma chère amie, si je ne suis
pas longue aujourd’hui, mais ayant besoin d’écrire à Madame Arnaud et chez moi,
mon temps est un peu limité.
Un de ces jours je vous donnerai plus de détails.
En attendant veuillez recevoir ainsi que Mr Décamps un
bon souvenir de mon mari, ne m’oubliez pas près du votre et acceptez mille bons
baisers de votre amie qui est heureuse de de pouvoir parler de vous.
Hélène
Vendredi prochain fera un an que nous sommes
mariés !!!Avouez que le temps passe vite.
Au revoir
Mexico,2 mai
1891
Bien chère Marie
Comme je te l’avais promis, je prends la plume du papier
et de l’encre pour te dire que ….lis et tu verras. Je ne te parle pas de mon
voyage et de mon arrivée car maman t’enverra mon journal et c’est inutile de
répéter i ce que j’ai déjà écrit.
En arrivant, Hélène m’a remis tes lettres ainsi que le discours
espagnol de Jules qui m’a bien fait rire. Je profite aujourd’hui de sa
permission d’écrire très brièvement. Mais dorénavant je t’écrirai plus
longuement et te tiendrai au courant de ce qui se passe par ici En ce moment,
Hélène écrit à mon côté à la maison pour faire connaître à Papa et à Maman nos nouvelles
conventions. Monsieur Calvet m’a pris dans son magasin en remplacement d’un commis
qui vient de le quitter. C’est bien le cas de dire que le malheur des uns fait
le bonheur des autres. Je vais être logé dans la maison et prendre la pension
avec A.Pradère et Vic. Lundi je vais descendre au magasin commencer ma nouvelle
vie et prendre une place que j’espère ne plus quitter.
En attendant le plaisir de vous lire, je vous embrasse
tous deux bien fort.
Votre frère dévoué.
Ch.Arnaud.
Tu trouveras ci-joint un chromo représentant le vapeur Le
Havre. Le Havre est le bateau modèle sur lequel ont été construits les 8
navires de la compagnie commerciale. Remplace donc Havre par Marseille et tu
auras la représentation exacte du navire qui m’a transporté vers ces rives lointaines.
Encore un gros baiser aux deux.
Mexico 14 juin
1891
Bien chère Marie
J’ai reçu ta lettre ou plutôt vos lettres dans le courant
de la semaine, mais par le manque de temps, je me suis vu obligé d’attendre à
aujourd’hui dimanche pour vous répondre. Je t’écris de ma chambre en face de
ton éventail qui fait très bien au-dessus de ma commode. Papa est au milieu,
marraine et toi à ses côtés, escortée chacune de vos moitiés : dessous sont les
enfants avec Carmen et en bas tout à fait encore papa lorsqu’il était jeune.
Sur ma commande est placé Jules photographié à la cramador. ; depuis deux
jours il a pour compagnon M. Carnot que Papa m’a envoyé : la société je
crois n’est pas mauvaise.
En arrivant au
Mexique J’ai eu comme tout le monde mes petites à dispositions D’abord j’ai
saigné les premiers jours 5 ou 6 fois du nez. Je me suis comparé pour
m’expliquer la provenance de ces saignements, à une pompe aspirante. De même
lorsqu’on fait le vide dans le tuyau l’eau se précipite et monte, de même que
notre sang n’étant plus retenu par le
poids d’une même colonne d’air cherche à s’échapper et trouvait par le nez une issue
à sa guise, il nous donne la peine de salir des mouchoirs. C’est un tribut que
payent tous les étrangers. Après deux purges sans effets, j’ai eu de fortes
coliques que l’on a laissées sévir toute
une matinée afin de ramoner la cheminée :à midi craignant que ça ne me
fatiguait pas trop on a songé à fermer les écluses. J’ai pris un remède à la
mexicaine qui se composait de 2 cuillerées d’amidon dans un verre d’eau sucrée
avec une goutte de citron et aussitôt tout s’est arrêté comme par enchantement.
Le remède est chic et pas cher.
Le climat est fort bon ici et cependant il y a des
petites précautions à prendre. De l'ombre au soleil Il y a de 23 à 30° de
différence aussi les gens du pays vous recommandent de passer le moins possible
de l’ombre au soleil et vice versa. Le soir en sortant des appartements chauds
se frotter les yeux à cause de la force du serein qui on en a vu des exemples pourrait
vous aveugler. On doit se baigner au moins tous les 15 jours et pour bien faire
tous les 8 jours. Il n’y a qu’une seule fièvre à Mexico mais qui y est en
permanence c’est le typhus. Comme l’habitude est une seconde nature on n’y
songe pas, et si on en parle c’est avec une grande tranquillité comme qui
parlerait d’un mal aux dents
Dans ma prochaine je vous parlerai des habitants de leurs
habitudes, puis des plantes et des fruits persuadés que cela intéressera Jules.
En attendant le plaisir de vous lire je vous embrasse aux
deux de cœur.
Votre frère dévoué
Ch. Arnaud
Hélène que j’ai vu en montant se rappelle aux bons
souvenirs de Jules et envoie ses amitiés à Marie.
Mexico 25 juillet
1891
Ma bien chère Marie
Votre bonne lettre et celle de Madame Arnaud m’ont fait
grand plaisir ;quand ces lignes vous parviendront vous serez à Bidache
près de vos parents vous rappelant votre vie passée et en goûtant encore les charmes.
Je compte donc sur votre bonne obligeance ma chère amie
pour remercier votre mère de sa gracieuse attention. J’ai été très sensible à
son souvenir et le petit emblème de Notre-Dame de Lourdes est précieusement
conservé.
Inutile de tout nous remercier mon mari et moi de ce que
nous faisons pour Chevalier ; les égards et les petits soins que nous avons
pour lui sont faits de grand cœur et j’espère qu’avec sa bonne volonté il
arrivera à faire un bon employé. Il a le désir de travailler, c’est la
meilleure des garanties.
(…)
Mon affection pour vous ma chère Marie est de celles que
rien n’altère, ainsi donc, soyez certaine qu’à _mot illisible_ du 15 août je
formerai pour vous mille vœux de bonheur !
Le bonheur vous l’avez déjà en grande partie, mais comme complètement je vous désire un bébé et alors ma chère amie vous pourrez croire que je
partagerai votre joie. Vous m’excuserez si je suis brève aujourd’hui,
mais j’ai plusieurs lettres à écrire ;je vous écrirai très prochainement
vous donnant quelques détails sur la fête du 14 juillet.
Soyez assez bonne pour offrir à Monsieur et Madame Arnaud
mon meilleur souvenir sans oublier Monsieur Décamps ; mon mari vous envoie à
tous ses amitiés et moi je vous embrasse de cœur vous disant encore bonne fête
.
Bien à vous de cœur.
Hélène
Mexico 16 août 1891
Bien chère Marie
J’ai reçu la semaine dernière, une de tes lettres écrites
de Bayonne qui m’a fait bien plaisir. Adieu maintenant pour moi les bains de
mer et de rivière, je dois me contenter de la baignoire. Adieu les rigolades
sur la plage, les coups que je buvais et que je faisais boire dans le grand
verre Océan. Je m’étonnais lorsque dans ton avant dernier tu ne m’avais lu
qu’une seule fois. Heureusement qu’hier j’ai vu que tu me faisais amende
honorable pour ton erreur. J’ai reçu également lettre de Jules et comme je tiens
à ce qu’il ait directement de mes nouvelles Je te prierai d’être assez bonne
pour lui envoyer à destination la présente que je continue à son adresse
Bien cher Jules
Voilà bientôt 15 jours que j’ai reçu votre amicale datée
du 15 juillet, mais malgré le désir que j’aurais eu de vous répondre plus tôt,
j’en ai été empêché par le surplus de travail qui m’est arrivé à la suite d’une
indisposition du frère de M.Calvet.
Puisqu’on vous expédie si loin pour faire les manœuvres,
que ne vous envoie-t-on pas au Mexique ; il ne vous faudrait guère plus de temps.
En 16 ou 18 jours vous pouvez arriver soit par New-York soit par Veracruz et je
suis bien sur que vous seriez heureux de votre excursion. Le pays est vraiment
riche et beau. Vous pourriez faire provisions de tabac, de sucre de cannes,
acheter de beaux chevaux pour 7 ou 8 piastres, le tout autrement bon qu’en France.
A part tous les fruits que nous avons dans notre pays et que l’on retrouve ici
tels que pèches, poires, prunes, raisons, figues, noix, arrivant en grande
partie des Etats-Unis, vous pourriez manger du chile, des ananas, des bananes,
des ahucates , des mangos , etc, tous très bons et qui pris avec modération ne
vous font aucun mal. Pour ma part, le dimanche quand je reviens de faire
quelque excursion, je suis toujours enchanté et émerveillé. Vous vous plaignez
de la chaleur et ici il ne fait pas de bien s’en faut aussi chaud qu’en France,
je ne crois pas encore avoir sué. Mais en revanche j’en ai pris ma dose en
passant au tropique. Voilà 8 jours que je n’oublierai jamais. Alors que je me
couchai à 2 h du matin après être resté jusqu’alors sur la passerelle avec
le capitaine et le commandant. Pas la moindre brise, pas le moindre souffle
qui venait rider la surface de l’eau et les voiliers attendant avec résignation
qu’un changement dans l’atmosphère vienne les faire reculer ou avancer. Je ne
sais pas la chaleur qui fait au Sahara mais à La Havane et à Veracruz il fait
rudement chaud et je n’ai vu que le commencement de l’été Qui doit ce donc être
maintenant qu’ils sont en pleine fièvre jaune. Ici ce qui nous sauve ce sont
ces grandes bourrasques appelées aguacueros, comme celle qui est en train de
tomber en ce moment.
Je vais à la poste, c’est l’heure du courrier. J’embrasse
Marie qui prendra sa part en passant et pour vous un bon baiser de votre frère.
Ch.Arnaud
Mexico 20 novembre
1891
Bien chère Marie
Tu dois être fâchée tout rouge contre moi, car voilà une
éternité que je ne t’ai pas écrit et d’après la lettre du 14 octobre que tu
m’écris de Bidache, je vois que c’est avec impatience que tu attends de mes nouvelles.
Cependant je ne puis pas dire que ce soit à titre de revanche car malgré mon
silence tu me donnais régulièrement de tes nouvelles et j’ai encore de tes
lettres datées du 7 septembre. Tantôt la flemme, tantôt le manque de temps m empêchaient
de prendre la plume. Mais j’espère que tu voudras bien me pardonner ce péché confessé.
Je vois que vous avez passé un été assez agité, surtout toi. Je te savais tantôt
à Bayonne, à Tarbes, à Bidache, à Cambo, à Biarritz. C’est bien gentil pour une
dame mariée de voltiger comme cela. Ah !si j’avais été là, je t’aurai grondé.
Pour moi, je mène une vie assez paisible. Cependant laisse-moi te dire qu’il y
a 15 jours j’ai été voir une course de taureaux aux bénéfices des inondés d’Espagne.
Mme Carmen Ruiz de Diaz noble épouse de Porfirio Diaz président de la
République présidait. L’ami Porfirio était à la gauche avec les ministres, les
généraux.Et moi aussi j’y étais avec Messieurs Calvet et Al.Pradere, mais nous
étions un peu plus haut avec les amis de la gloire et du soleil
Nous venons d’avoir 2 jours de fête : les Saints et les Morts.
Ah lundi nous étions au cimetière français pour arranger la tombe du Père de
M.Calvet. A 9 h ½ nous avons entendu la messe chantée en plein air au milieu du
cimetière.
L’après dîner Urbain et moi, armés chacun d’un makila,
sommes allés à un cimetière indien. Les indiens ce jour-là emportent le dîner au cimetière où ils mangent et boivent à la santé du mort, sur le morceau de
terre qui recouvre le défunt qui les touche. C’est je t’assure un vrai champ de
morts. Car ils boivent du pulque, tous hommes, femmes, et enfants, jusqu’à
tomber ivres morts. C’est là un nouveau genre de prier et de pleurer que tu ne
connaissais pas. D’ailleurs le jour des morts est considéré par les gens du
pays comme un jour de fête. Les domestiques vous demandent une étrenne
appelée la calavera d’où l’expression :este es un calaveron.Celui ci est
un noceur et non pas un cadavre. Nos bamos à calaverarla nous allons faire la noce et moi je vais travailler, en vous
embrassant bien fort aux deux.
Votre frère dévoué.
Ch.Arnaud.
La lettre est pour mari et femme.
Complément du blog
La fiche matricule de Jean-Baptiste Arnaud ,matricule 1532,classe 1893;indique qu'il s'est engagé pour quatre ans le 19 novembre 1892 à la mairie de Tarbes (Hautes-Pyrénées). Et qu'il est décédé à Bidache le 23 mai 1903.
Source:
https://earchives.le64.fr
Registres militaires
Arnaud Jean-Baptiste
Par ailleurs,il s'est marié le 15 juin 1899 à Oloron-Sainte-Marie avec Jeanne Marie Berthe Fauqué née à
Buenos Ayres (Argentine).
Source:
https://earchives.le64.fr
Oloron-Sainte-Marie 1899-1902 Acte N°36 Vue 27/178