Assistance publique._Mendicité
Pau,le 7 décembre 1867
Le Préfet à MM.les Maires du département
Messieurs,
La saison de l'hiver ramène les chômages dans les travaux et rend les besoins des pauvres plus pressants et plus nombreux.C'est le moment où votre sollicitude doit être plus particulièrement éveillée sur les moyens à employer pour secourir les indigents et les empêcher de se livrer à la mendicité.
Je viens vous rappeler,Messieurs,les devoirs qui vous incombent dans cette importante matière de l'assistance communale,si intimement et si nécessairement liée aux mesures par lesquelles la mendicité a été interdite dans le département.
A diverses reprises,je vous ai dit que l'interdiction de mendicité ne saurait être légale et efficace qu'autant que les communes assureraient à leurs pauvres des moyens de subsistance suffisants.En effet,lorsqu'un acte de mendicité se produit,il faut,pour être en droit de le réprimer,pouvoir dire au délinquant qu'il aurait pu trouver dans la commune à laquelle il appartient du travail ou des secours.
Si vous négligez cette question de l'assistance,il n'est pas douteux que les mendiants reparaîtront.
Vous devez donc toujours vous préoccuper de savoir comment les pauvres seront assistés.Vous réunirez les bureaux de bienfaisance,et vous leur ferez toutes les propositions que vous jugerez utiles.Au besoin,vous proposerez au conseil municipal un vote de crédit pour venir en aide au bureau de bienfaisance.Vous provoquerez les dons des habitants pour qu'ils les remettent au bureau de bienfaisance ou les distribuent eux-mêmes,si tel est leur désir.Vous ferez appel,pour vous seconder,au zèle charitable de M.le desservant ou de M.le pasteur et au dévouement de toutes les personnes dont l'influence est accréditée.Vous vous attacherez enfin à faire comprendre à vos administrés qu'il faut qu'ils prennent soin de leurs pauvres s'ils ne veulent pas être assaillis,comme autrefois,par les mendiants indigènes et étrangers.
Je ne saurais indiquer ici des règles uniformes pour la distribution des secours.Les besoins des indigents et les moyens de les secourir peuvent varier d'une commune à l'autre,et les bureaux de bienfaisance et les commissions de charité apprécieront,mieux que je ne pourrais le faire,la marche qu'ils auront à suivre.J'appellerai seulement votre attention sur les nécessités de diviser les pauvres en deux catégories,celles des valides et celles des invalides,en vous signalant la nature des secours qu'il convient d'attribuer à l'une ou à l'autre.Pour les pauvres valides,on créera,autant que possible,des ateliers de travail sur les chemins ou ailleurs.Les pauvres invalides seront assistés en nature,et on leur distribuera des bons de pain,de viande ou d'autres denrées,et les vêtements que l'on aurait pu recueillir.Je ne doute pas que la charité ne s'ingénie partout à trouver les remèdes aux maux existants.Les moyens seront divers,mais le but sera le même,et vous agirez de manière à ce qu'il soit sûrement atteint.
L'assistance communale étant organisée,vous avez le droit et le devoir d'empêcher les actes de mendicité et de verbaliser les délinquants.La seule tolérance admise pour les pauvres qui résident dans la localité consiste à leur permettre de recueillir à domicile,à certains jours déterminés de la semaine,les dons que les habitants sont disposés à leur accorder.Pour qu'il puisse être fait usage de cette tolérance,il est nécessaire qu'un arrêté municipal l'autorise.Cet arrêté,qui mentionne les noms des pauvres et les jours où ils peuvent se présenter à domicile,est soumis à mon approbation.En dehors de cette exception,tout acte de mendicité constitue un délit qui doit être réprimé.Vous le constaterez donc ou vous le ferez constater par la gendarmerie,la police ou le garde-champêtre.Le procès-verbal sera transmis à M.le Procureur impérial et une expédition m'en sera adressée.Le délinquant sera écroué à la maison d'arrêt.
Bien que la mendicité soit depuis sept ans interdite dans le département,et que cette interdiction soit notoire,on voit encore,dans certaines communes,des mendiants étrangers qui s'y rendent les jours de marché ou de foire et les jours des fêtes locales,pour y étaler leurs plaies vraies ou simulées et y provoquer la charité des passants.Vous devez rigoureusement vous opposer à cet abus et renvoyer le mendiant,s'il est réellement infirme,dans la commune où il est domicilié;s'il simule des infirmités,vous n'hésiterez pas à le mettre à la disposition de M.le Procureur impérial.
Il est une autre catégorie d'individus qui,bien que ne tendant pas ostensiblement la main,n'en doivent pas moins être considérés comme des mendiants.Je veux parler de ceux qui sous prétexte de vendre quelques denrées sans valeur,de montrer des curiosités,ou de jouer de quelques instrument,parcourent les villes et villages et recueillent partout des aumônes au préjudice des pauvres du lieu.Ces mendiants nomades sont presque toujours des étrangers dangereux,d'autant plus enhardir à revenir que l'on a été tolérant à leur égard.Ne leur délivrez aucune permission et opposez-vous à ce qu'ils séjournent dans la commune;c'est le plus sur moyen de leur en faire oublier la route.Rappelez-vous que la mendicité est également interdite dans les départements des Hautes-Pyrénées,des Landes et du Gers,qui confrontent au notre,et que si vous ne faisiez constamment preuve de vigilance et de fermeté,vous verriez inévitablement s'abattre chez nous tous les mendiants que ces départements refouleraient.
En certains endroits,on voit des enfants demander l'aumône dans les rues ou la solliciter des voyageurs quand les voitures passent sur les routes.Ce sont des enfants en bas âge qui agissent sans discernement,et à l'égard desquels on ne peut sévir.Appelez leurs parents à la mairie et faites-leur comprendre les dangers vers lesquels ils entraînent ces enfants en leur laissant contracter des habitudes de paresse et de mendicité.
En résumé,vous avez,Messieurs,deux taches à remplir.La première consiste à assurer par tous les moyens en votre pouvoir l'assistance des pauvres qui résident et ont domicile dans la commune.La seconde exige que les actes de mendicité soient constatées et les mendiants déférés à la justice.Ces deux taches sont liées par une étroite solidarité,et c'est de leur strict accomplissement que dépend l'extirpation complète de la mendicité étrangère et la sécurité des communes que vous administrez.
Recevez,Messieurs,l'assurance de ma considération très-distinguée.
Le Préfet des Basses-Pyrénées
G.D'Auribeau
Cerifié conforme
Le Secrétaire Général
D'Etigny
Source
Empire Français
Département des Basses-Pyrénées
Recueil des actes administratifs
Année 1867
Pages 385 à 388
Collection particulière
Compléments d'archives numérisées
H DÉPÔT BAYONNE N 21_12 vues
1835-1836
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Mendicité et dépôts de mendicité _399 vues2 Z 194
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