Le bail à métairie
Usages du Pays Basque
Extraits
Avant-propos
Vivant au milieu des populations rurales du Labourd,j'ai souvent constaté les difficultés nombreuses que soulève l'exploitation agricole,au point de vue des rapports du maître et du métayer.J'ai cherché un Guide pratique où se trouvent à la fois les règles générales du métayage et ses particularités dans notre beau Pays Basque,si jaloux de ses vieilles coutumes.Ce guide n'existe pas:de là l'idée de cette brochure.
Des plumes plus autorisées que la mienne pourront reprendre ce travail,et y ajouter les fruits d'une longue expérience que je n'ai pas acquise.
Heureux serai-je d'avoir apporté à l'édifice son premier grain de sable.
Château de Suhy,février 1891.
Ch.AMESTOY
LE BAIL A MÉTAIRIE
I
THÉORIE DU BAIL A MÉTAIRIE
Le bail à colonat partiaire ou métayage est le contrat par lequel le possesseur d'un héritage rural le remet pour un certain temps à un preneur,qui s'engage à le cultiver sous la condition d'en partager les produits avec le bailleur (Loi du 18 juillet 1889,art.1).
Cette définition ,vraie en ce sens qu'elle rend bien compte des effets du contrat,n'est pas juridique,parce qu'elle n'indique en aucune façon,la nature et les caractères de ce même contrat..
Cette indication nous semble d'autant plus nécessaire que les auteurs et la jurisprudence ont émis sur la question les opinions les plus diverses.
Barthole,Cujas,Delvincourt,y voient une Société:le propriétaire livre sa terre;en retour,le colon fournit ses bras et sa peine,et les fruits se partagent.C'est la théorie romaine;(...)
M.Duvergier combat cette théorie.Il fait remarquer que dans une société ,les associés se partagent les profits et les pertes,tandis que,dans le bail à métairie,le bailleur partage les bénéfices,alors que les pertes sont toutes à la charge du preneur;il cite encore d'autres éléments qui ne s'accordent pas avec le contrat de société,et reconnaît au bail à métairie le caractère du
Louage.
Enfin,Balde et Guy-Coquille proposent un troisième système:ils font du bail à métairie un contrat innommé,participant à la fois du louage et de la société.
C'est le système que nous adaptons,et nous définissons le bail à métairie:
un contrat innommé,consensuel,synallagmatique et de bonne foi,qui participe à la fois du louage et de la société.
1°
Innommé,parce que renfermant tous les éléments d'un contrat défini par le droit civil,il est difficile,sinon impossible,de le classer et de le qualifier;
2°
Consensuel,parce que l'acte est parfait par l'accord seul de la volonté des parties,sans qu'il soit besoin d'une forme authentique,ni même d'un sous-seing privé;
Le bail à métairie peut être donné verbalement,comme cela se pratique souvent dans le pays basque;mais cette faculté présente un danger.La preuve d'un bail verbal ne peut être faite par témoins,s'il n'y a pas un commencement d’exécution,quelque modique qu'en soit le prix;le serment peut seulement être déféré à celui qui nie le bail (art.1715,C.C.);
3°
Synallagmatique,parce qu'il engage les deux parties contractantes;
4°
De bonne foi,comme tous les contrats qui se forment
solo consensu.
Nous avons indiqué ce caractère,parce qu'il nous servira à déterminer la responsabilité des parties.
En règle générale,dans les contrats de bonne foi,la responsabilité du débiteur comprend seulement le dol et la faute lourde,lorsqu'il est personnellement désintéressé au contrat,comme par exemple dans le contrat de dépôt.Mais dans notre contrat,le bailleur et le preneur sont obligés dans leur propre intérêt;on doit donc répondre,ici,non-seulement du dol et de la faute lourde (...) mais encore de la faute légère ,(..)c'est à dire de cette faute,de cette négligence que le père de famille le plus diligent,personnage évidemment abstrait ,n'eut pas commise.
En termes plus ordinaires,le bailleur et le preneur doivent agir en bon père de famille.
II
DES OBLIGATIONS GÉNÉRALES DU BAILLEUR ET DE SES DROITS
Le bailleur est tenu à la délivrance et la garantie des objets compris au bail.Il doit faire aux bâtiments toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires.Toutefois,les réparations locatives ou de menu entretien qui ne sont occasionnées ni par vétusté,ni par la force majeure,demeurent à moins de stipulations ou d'usage contraires,à la charge du colon (Loi du 18 juillet 1889,art.3)
Le bailleur est donc tenu de procurer au preneur la jouissance de la chose pendant toute la durée du bail.Le droit du preneur a pour objet tant l'usage de la chose que les fruits,abstraction faite,dans le bail partiaire,de la quotité qui forme le prix.
Comme dans l'usufruit,la propriété des fruits n'est transférée que par leur perception.Le bail offre une certaine analogie avec l'usufruit;mais l'un diffère de l'autre à certains points de vue qu'il est inutile d'examiner,et qui peuvent se rattacher au principe suivant:le nu-propriétaire
laisse jouir l'usufruitier;le bailleur
fait jouir le preneur.
Être tenu à la délivrance de la chose n'interdit pas seulement au bailleur tous les actes qui seraient de nature à troubler la jouissance;par voie de conséquence,le bailleur est tenu:
1°De livrer la chose et de la livrer avec tous les accessoires expressément ou tacitement contenus dans le bail;
2°Il doit entretenir la chose et y faire toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires.L'art.3 de la loi du 18 juillet 1889 entend évidemment ne mettre à la charge du bailleur que les
grosses réparations,car le législateur a soin de charger le colon des réparations locatives ou de menu entretien qui ne sont occasionnées ni par vétusté ni par force majeure;
3°Il répond des vices qui empêchent la jouissance ,qu'il les ait connus ou non avant le bail (1721,Code Civil).
On peut citer,comme exemple,le cas où une personne ayant loué une prairie pour y faire paître des bestiaux,il croît dans cette prairie des herbes vénéneuses qui font mourir les animaux qui s'en nourrissent .(Dalloz,
verbo:LOUAGE,n°189);
4°Il est garant de l'éviction qui peut se présenter de deux manières;ou le bailleur loue une métairie qui ne luis appartient pas,et alors le métayer est dépossédé par le vrai propriétaire;ou bien,le bailleur,propriétaire au moment du contrat,vend la métairie pendant le bail,ou est exproprié.
(...)
III
DES OBLIGATIONS DU MÉTAYER
La principale obligation du preneur, dans le contrat du bail
à métairie, est incontestablement le payement du prix : nous savons déjà que le
prix, dans ce bail, consiste dans une quote-part des récoltes ou autres produits.
Les produits se partagent le plus ordinairement par moitié : c’est de là que
vient l’expression de métayer, métairie, (bas latin, médiatarius, du latin
médiétas partage par moitié).
Les autres obligations du preneur peuvent se réduire aux
trois propositions suivantes :
1°Le preneur doit agir en bon père de famille, et
doit, par conséquent veiller à la conservation de la métairie et de ses
servitudes actives ;
2°Il doit conserver à la chose sa destination
et ne rien modifiait à la culture ;
3°Il doit restituer à la fin du
bail.
Telle est la synthèse des obligations du preneur ; mais il
est indispensable d’en donner l’analyse et d’entrer dans les détails, non
toutefois sans faire remarquer qu'étant donnée la nature de ce contrat, ces
obligations peuvent être variées à l’infini.
1°Bestiaux
les bestiaux, affectés à une métairie,
y sont placés pour aider le métayer à la culture de la terre. L’intérêt
supérieur de l’agriculture exige qu’il soit absolument interdit au métayer, à
moins toutefois de conventions contraires, de faire servir les bestiaux à des
usages étrangers à la culture du sol. Il ne peut, par exemple, se livrer à des
charrois pour le compte d’un voisin ou d’un industriel quelconque.
Il y est souvent incité par le gain immédiat que lui procurent
ces charrois ; mais ils ne songent pas que, même à son point de vue
particulière et dans son intérêt bien entendu, il lui serait plus profitable de
travailler la terre. En effet, quand il passe ses journées sur les chemins
publics, il perd le fumier que ces bêtes auraient laissé dans la métairie ; il
use ses voitures et tout son matériel ; à un autre point de vue, ses bêtes,
fatiguées toute la journée sous le joug ou le harnais, s’épuisent, maigrissent et
perdent de leur valeur.
Toutes ces raisons, vraies au regard du métayer lui-même, le
sont encore davantage pour le propriétaire, qui, lui, n’a même pas ce gain
illusoire que touche le métayer,
Que faut-il penser du croît des animaux ? Le croît, au point
de vue de notre contrat, n’est pas précisément constitué par les jeunes élèves
: ce n’est pas absolument le jeune veau qui naît dans la
métairie ou le poulain qu’amène le printemps. Le croît, c’est la plus-value
dans le capital que représentent les bestiaux ; c’est la vache revendue à un
prix supérieur à celui qu’elle avait coûté ; car, en définitive, la naissance
d’un jeune produit peut quelquefois ne pas être considérée comme un croît,
parce qu’il faut bien remplacer à l’étable les bêtes affaiblies ou atteintes
par la vieillesse.
En tout état de cause, le croît, la plus-value, se partage
par moitié.
Les bestiaux appartiennent le plus souvent en entier aux
propriétaires et sont placés en cheptel chez le métayer (...) ; mais quelque fois le métayer est propriétaire de la moitié du
bétail, soit qu’il l'ai amené en entrant dans la métairie, soit qu’il ait peu à
peu constitué ce capital grâce au croît, par une entente avec le
propriétaire.
Pour la vente ou l’achat des bestiaux, il arrive souvent des
difficultés entre le métayer et le propriétaire, soit sur l’utilité de la
vente, soit sur son opportunité dans telle ou telle saison. La volonté du
propriétaire doit prédominer dans la question : cela relève évidemment du droit
de direction qui lui est reconnue par la loi de 1889, comme on l’a déjà indiqué
dans le chapitre précédent.
Dans le cas où le bétail est à moitié, il est le plus
souvent vendu à la sortie du métayer, et le prix est partagé. Nous savons que
le bétail lorsqu’il est fourni par le propriétaire soit en entier, soit par
moitié, est immeuble par destination (art.522. C .C)
Nous en tirons cette conséquence qui n’est pas rigoureuse,
mais dont l’équité nous a frappé : si, à la sortie du métayer, le propriétaire veut garder sur sa terre tout le bétail, il peut le faire sur estimation. Le
métayer, qui doit vendre quand même, n’a rien à perdre : il a la garantie de
l’estimation, et le propriétaire a l’immense avantage de conserver un bétail
habitué au travail de la métairie, ainsi qu’à ses pacages. À défaut de texte
positif, l’intérêt supérieur de l’agriculture doit toujours nous guider.
Tous les bestiaux ne servent pas d’une façon directe et
active à la culture de la terre, comme les bœufs et les chevaux de labour ; il
en est d’autres auxquels on ne peut réclamer aucun travail, comme par
exemple, les moutons. Ceux-ci se bornent à produire, à engraisser la terre de
leur fumier ; et la tonte de leur laine augmente les revenus de
la métairie.
Lorsque vient l’époque de la tonte, il est prescrit au
métayer d’en avertir le propriétaire, pour que celui-ci puisse exercer
utilement son droit de direction et sauvegarder ses intérêts.
La tonte, ainsi que le croît , se partage par moitié.
2°Récoltes
Dans le pays basque, dont cette étude ne veut pas dépasser
les limites, les principales récoltes sont le blé, le maïs, le la, le foin et
le regain.
Le froment, le maïs et le lin se partage le plus
ordinairement par moitié ; dans certaines localités, le propriétaire prélève la
dîme, qui représente les semences qu’il a fournies. Le métayer, auquel incombe
le travail de la perception des fruits, fait, dans le champ, deux tas égaux,
et le propriétaire a le droit de choisir le tas qui lui convient. Le métayer
doit alors porter la part du propriétaire à son domicile ; il n’est libéré que
par cette remise et ne peut, d’ailleurs faire aucun usage des récoltes tant
qu’elles n’ont pas été partagées.
Le métayer doit toujours avertir le propriétaire de son
intention de faire la récolte, pour que celui-ci soit mis à même de juger de
l’opportunité du fait, et d’exercer un contrôle.
La remise par le métayer de la part du propriétaire ne crée
pas en profit de ce dernier un droit nouveau. Il est sensé avoir toujours été
propriétaire de sa part ; comme conséquence, les créanciers du métayer n’ont
aucune action contre le propriétaire.
Le foin, le regain, la paille, comme aussi tous les engrais,
fumiers, etc., doivent être utilisés sur la métairie. Nous ferons remarquer que,
dans le droit commun, le preneur est tenu à sa sortie, de laisser les
objets dans l’état où il les a reçus. D’où il résulte, que, à défaut d’usages,
le métayer, à sa sortie, doit laisser dans la métairie la quantité de paille,
engrais, fumiers, etc. qu’il y a trouvée à son entrée. Le foin, la paille, les
engrais, ne se trouvent pas toujours utilisés à la fin du bail. Il est du plus
haut intérêt de faire connaître leur sort. Dans le Pays basque nous avons, sur
ces questions, les usages les plus variés et les mieux réglés.
Usages locaux
Cantons de Bayonne (Nord-Ouest,Nord-Est)
Dans les deux cantons de Bayonne,on doit réciproquement se donner congé,dans quelques communes à la Saint-Jean (24 juin);dans d'autres à la Notre-Dame (15 août),pour avoir effet à la Saint-Martin (11 novembre).
(...)
Canton de Bidache.
Époque de la rentrée et de la sortie du métayer:11 novembre.Le congé doit être donné le 15 août.
Le métayer entrant peut faire tous les travaux qui doivent être exécutés depuis le 15 août pour certaines récoltes de l'année suivante,par exemple ,pour les navets,les trèfles,etc.Il peut engranger aussi les foins,les regains,pailles et fourrages de maïs dans la métairie où il va.Le métayer sortant emporte la paille du froment,et la feuille ainsi que les cimes du maïs.Il doit laisser une quantité de fumier ou d'engrais égale à celle qu'il a trouvée;s'il a déficit,il le répare suivant estimation;s'il y a excédent,le propriétaire lui paye la moitié de la valeur de cet excédent sur estimation.
Canton d'Espelette
Entrée et sortie:11 novembre;le congé doit être donné six mois à l'avance.
Une maison avec jardin ou terre dont la contenance ne dépasse pas 30 ares n'est pas assimilable à un bien rural;le congé,dans ce cas,est donné trois mois à l'avance;la même règle régit les moulins à farine.
Excepté le fourrage,dont profitent exclusivement les métayers moyennant une redevance annuelle en argent,toutes les récoltes se partagent en nature entre eux et les propriétaires.
Indépendamment des facilités qu'aux termes de l'article 1777,le colon sortant laisse à son successeur pour les travaux préparatoires,la confection des clôtures et les soins à donner aux prairies,l'usage concède au métayer entrant une partie des terres dont le blé vient d être moissonné,pour la culture de la rave et de la farouche (
trèfle incarnat),que l'on sème en août et septembre.
Presque tous les métayers sortants emportent la paille et les feuilles sèches du
maïs qui n'ont pas été consommées,ainsi que l’excédent du fumier,que le propriétaire peut cependant retenir sur estimation.
En général,depuis quelque temps,dans le bail écrit ou verbal,le propriétaire fait réserve,sans paiement,de tous les engrais au profit des métayers entrants pour la bonification de la ferme .Cet usage nous parait plus conforme aux principes que le précédent.
Canton de Hasparren
Entrée et sortie du métayer:11 novembre;le congé doit être donné le 25 mars,dernier délai.
La ferme des prairies étant fixée en argent,dès le 25 mars,le métayer sortant ne doit plus toucher aux prairies.Il en abandonne la jouissance et l’administration à son successeur,qui commence aussitôt à avoir soin des clôtures et à exécuter quelques ouvrages préparatoires,et,entre autres,il y pratique des rigoles pour la conduite des eaux qui doivent servir aux irrigations.Quant aux irrigations,un métayer doit y employer un nombre de jours proportionné à l'étendue de sa terre.
Au temps de la fenaison,le métayer entrant transporte ses fourrages à la maison d'exploitation,qu'il ne doit cependant habiter qu'à la Saint-Martin prochaine;le métayer sortant est aussi tenu de mettre à la disposition du métayer entrant son fenil,ou de lui fournir dans le même bâtiment un local où celui-ci puisse serrer commodément sa récolte de foin et de regain;il existe cependant une exception dans quelques communes du canton,où le métayer sortant jouit des herbes mortes jusqu'au 15 novembre,à l’exclusion néanmoins des récoltes de foin et regain,faites toujours par le métayer entrant.Il est bien entendu que si le métayer sortant a déjà vendu à un voisin les feuilles mortes,sans que le fumier qu'elles ont produit ait été rapporté à la métairie,il est tenu de fournir ,à sa sortie,son équivalent en fumiers ou autres engrais;il ne peut jamais être obligé à fournir cet équivalent en chaux,qui est censée agir sur la terre pendant trois ans.
Il est d'usage que le métayer laisse par anticipation à la disposition de son successeur le champ d'où il vient d'enlever la récolte du froment,afin que le métayer entrant puisse,par un labour entrepris aussitôt,préparer la terre pour la culture de la rave que l'on sème à la première quinzaine du mois d'août.Il est aussi de coutume que le fumier qui a été confectionné à la métairie à l'aide des produits de l'exploitation,soit répandu et consommé sur les terres qui en dépendent,et si,au moment de la sortie du métayer,il y a un excédent d'engrais,que le métayer entrant en profite sans payer aucune indemnité à celui auquel il succède.
Le métayer sortant emporte avec lui toute la paille qui lui reste de sa part de froment,ainsi que les feuilles sèches de
maïs (
hostoa) qui n'ont pas été consommées jusqu’alors;mais il est tenu de faire consommer à son bétail verte ou séchée la cime (
capeta) de la même plante de
maïs.Cette distinction entre la cime et les feuilles s'explique parce que la cime se mange en vert le plus ordinairement et avec plus de profit;si le métayer avait le droit de l'emporter ,il aurait tout intérêt à la faire sécher et à la garder au grand détriment du bétail.
Canton de Labastide-Clairence.
Entrée et sortie du métayer:11 novembre.
Quant aux délais à observer pour les congés des métayers,il est d'usage qu'on donne congé à la Saint-Jean (24 juin),afin que le métayer entrant puisse faire la récolte du foin et du regain de la métairie qu'il prend.
Il faut faire observer néanmoins que lorsque le métayer ne jouit pas du foin et du regain lors de son entrée,il a la faculté de les emporter en sortant,mais qu'il n'en pas moins obligé pour cela de nourrir le bétail attaché à la métairie en bon père de famille jusqu'au moment de sa sortie.
Mais ,hors ce cas,il ne doit pas y toucher et jouit seulement des herbes mortes,qui ne doivent être consommées que par le bétail attaché à la métairie.Il est aussi d'usage que lorsqu'un métayer doit sortir d'une métairie,il permette,bien avant sa sortie,à celui qui doit le remplacer d'ensemencer le navet en temps utile(ordinairement au mois d'août).
Il est encore d'usage que d'un commun accord,le maître et le métayer vendent la plus grande partie du bétail après que les maïs sont ensemencés,afin de conserver les foins pour le métayer qui doit venir.
Lorsque le maître et le métayer font à frais communs une fournée de chaux,il est d'usage que,si le métayer prend lui-même son congé,il perd tous ses droits au bénéfice que les terres chaulées par lui peuvent produire pendant les années qui suivent son départ;que si,au contraire,le congé lui est donné par le maître,celui-ci est tenu de l'indemniser de la bonification produite dans les terres par la dite chaux pendant les années où il n’en jouira pas, et ce, dans la
proportion toujours décroissante des années qui restent à courir ; cette
estimation se fait par experts. On estime généralement, dans ce canton, que les
effets du chaulage se font ressentir pendant cinq ou six ans, mais en
s’amoindrissant chaque année.
Canton de Saint-Jean de Luz
Entrées et sorties du côlon 11 novembre ; dernier délai du
congé : 24 juin avant midi.
Il y a obligation pour le métayer sortant de laisser-faire
aux métayers entrants tous les travaux préparatoires pour l’année suivante,
semer des raves, fenu-grec, farouche (trèfle incarnat) ; de lui
abandonner les locaux nécessaires pour loger les pailles, fourrages et quelques
outils aratoires.
Le métayer sortant est obligé d’indiquer au métayers
entrant les bornes du terrain communal affecté ordinairement, mais pas
toujours, à chaque métairie.
Le fumier est partagé entre le propriétaire et le métayer par égales portions ; mais le propriétaire a la faculté de garder la portion du
métayer en la payant au prix d’estimation. Il faut expliquer que le fumier
ainsi partagé est celui fait du 24 juin au 11 novembre, jour de la sortie, tous
les fumiers faits antérieurement étant acquis à la propriété et devant être
déposés sur les champs.
Le chaulage des terres ayant ordinairement au moyen de la
chaux faite par le métayer à moitié frais avec le propriétaire, si ce dernier
congédie le métayer avant l’expiration du temps nécessaire pour profiter de
cette bonification qui dure quatre et cinq ans suivant les localités, idée du
une indemnité au métayer sortant pour l’annonce licence d’une amélioration à
laquelle il a concouru.
Le pacage, sur toutes les terres qui doivent être
ensemencées en maïs, appartient au propriétaire à partir de Noël jusqu’à
l’époque à laquelle cette céréale doit être confiée à la terre.
Canton d’Iholdy.
Les colons partiels rentrent et sortent le 11 novembre : les
congés doivent être donnés dans une partie du canton le 24 juin, dans l’autre
le 25 mars.
Le 25 mars est l’époque favorable pour ces sortes de congés ;
c’est dès ce jour que les métayers sont obligés de ne plus introduire les
animaux dans les prairies, que les nouveaux commencent à y curer les rigoles, à
relever les terres et à faire les fermetures, etc.
Comme le métayer sortant doit jouir des pâturages des
prairies après la rentrée du foin et du regain faite par celui qui doit le
remplacer, ce dernier doit l’avoir faite dans certaines communes au 20 juillet,
dans d’autres le 1er août et dans d’autres le 15 du même mois. Ces
différences de date s’expliquent par la différence même de la fertilité du sol,
plus riche dans certaines communes que dans d’autres.
Pour la semaille du lin, il est d’usage que le métayer
sortant doit laisser semer au haut rentrant l’étendue de terre convenue avec le
propriétaire.
La rave et la farouche entre parenthèse (trèfle incarnat) doivent aussi être semées par le métayers
entrants sur les terres dépouillées de leurs récoltes. Les cimes de maïs sont
généralement réputées comme fourrages appartenant au colon entrant ; il est
d’usage néanmoins que le sortant peut faire manger, en vert, quelque peu de
cimes de maïs en s’entendant avec celui qui doit le remplacer.
Quant aux pailles et engrais, l’article 1778 du Code civil
fait loi entre le métayer sortant et celui qui le remplace. Les dépouilles de maïs
(hostoa) rentrent dans la catégorie des pailles.
Canton de Mauléon
Les congés au fermier d’un bien rural
doivent être donnés à la Saint-Jean (24 juin). Le bail commence le
1er novembre.
Cette date du 1er novembre consacre un usage qui
n’est pas reçu dans les cantons déjà étudiés, où le bail ne commence que le 11.
Le 1er novembre nous semble une date mieux choisie au point de vue
de l’exploitation agricole. À cette époque les maïs sont rentrés, et rien ne
s’oppose à l’introduction du nouveau métayer, d’autant plus que ce fait
fournirait l’occasion de semer les blés dix jours plus tôt : il est reconnu par tous
les agriculteurs qu’avancer l’époque des semailles, c’est augmenter d’autant les
chances de succès quand il s’agit du blé.
Dans les plaines, chaque commune possède deux campagnes ou
Elgue, l’une affectée au maïs et l’autre au froment. On nomme ainsi la réunion
des terrains des habitants sous une même clôture, sans séparation des parcelles
de chacun que par des pierres-bornes. Après la récolte des fruits, la campagne
étant libre est livrée à la dépaissance de tous les bestiaux de la commune.
Canton de Saint-Étienne-de-Baïgorry
Le propriétaire et le colon partiaire se donnent congé avant le
25 mars, afin de faire cesser le bail le 11 novembre suivant. Le colon partiaire entrant fait des récoltes des foins et regains de l’année courante, afin
d’assurer la nourriture de son bétail pendant l’hiver ; il laisse les herbes mortes au métayer sortant jusqu’au 11 novembre, jour de sa sortie.
L’usage local veut que le métayer sortant laisse à l'entrant
les facilités nécessaires pour les récoltes des foins, regains, fougères, etc.
Canton de Saint-Jean-Pied-de-Port
Entrée et sortie du métayer :
11 novembre dernier délai du congé: 25 mars.
Le métayer sortant abandonne les prairies le 25 mars, et le
métayer entrant les soigne et fait les foins. Le métayer sortant laisse au
nouveau métayer dans la métairie les emplacements nécessaires pour engranger
les foins, lins, haricots, châtaignes, pommes de terre etc. Les fumiers qui
existent dans la métairie au moment de la sortie appartiennent au métayer
entrant, sans qu’il soit tenu de payer aucune indemnité au métayer sortant.
Le métayer sortant fait consommer les regains et jouit des
pacages jusqu’au moment de sa sortie, qui a lieu le 11 novembre. Le métayer
sortant doit laisser le rentrant semer la rave et la farouche ( trèfle incarnat), aussitôt que la récolte du froment est faite. Le paiement des
prairies s’effectue le 25 mars.
Canton de Saint palais
Les baux à loyer comme cela à ferme
commencent dans le canton de Saint palais, le 11 novembre. Ils sont censés faits
pour une année.
Pour les baux à ferme, l’usage exige que les congés soient
donnés ou signifiés avant la Saint-Jean ( 24 juin).
L’usage exige que le métayer sortant est terminé ses travaux
pour le 11 novembre, époque de l’expiration du bail, et que le métayer qui doit
le remplacer ait le droit de faire les foins et les regains ; de couper en outre
les cimes de maïs, ainsi que les feuilles, et d’engranger le tout. Il profite
d’ailleurs des pailles de froment que le métayer sortant doit laisser dans la
métairie. Il est enfin autorisé à sarcler le maïs au mois d’août ou de
septembre, afin de préparer la terre pour la semence du froment. Du reste,
l’usage veut aussi que, à partir du 25 mars, le fermier entrant soigne les
clôtures et les prairies dans lesquelles le fermier sortant ne peut plus
introduire son bétail,et ce depuis la même époque.
Canton de Tardets
Les baux de biens ruraux se font, dans
ce canton, pour un an, à moins de conditions contraires. Ils commencent et
finissent le 1er novembre. Il faut qu’il y ait congé pris ou donné
avant le 24 juin. Passé ce délai, le bail est continué aux mêmes conditions.
Si le métayer entrant reçoit les fourrages de l’année
faits et serrés, il doit les laisser de meme en sortant, sans indemnité
dans aucun cas. Le plus souvent, le métayer entrant fait et engrange lui-même
les foins, et il est dispensé de ce travail l’année de sa sortie.
Le métayer doit mettre en défends, le 1er mars,
les prairies qui d’habitude produisent les deux récoltes (foin et
regain), et le 1er avril, celles qui ne donnent qu’une seule coupe.
S’il y a des bêtes ovines, elles paissent jusqu’au 20 avril dans les prairies
qui ne donnent qu’une seule récolte.
Le métayer sortant jouit des pâturages jusqu’au 1er
novembre, soit après le foin, soit après le regain, selon que les prairies
sont destinées à une ou deux récoltes.
Il y a, en outre, le plus souvent, une prairie désignée
d’avance pour les agneaux ; on les y tient jusqu’au 11 juin.
Indépendamment des domaines ruraux complets il y a encore,
dans ce canton, des établissements d’un second ordre, les Bordars et les
Cayolars. Leur étude nous entraînerait à l’examen de la Commission
syndicale de Soule, qui n’entre pas dans le cadre de ce travail.
Ces usages ont été le plus souvent textuellement pris dans
un ouvrage M.Orcurto-Joany où se trouvent condensés les travaux
de commissions cantonales instituées par arrêté préfectoral, en exécution d’une
circulaire ministérielle du 26 juillet 1844, rappelée le 5 juillet 1850 le 15
février 1855.
4°Arbres fruitiers et autres
Les pommes, les poires, les cerises, les châtaignes, et
autres produits d’arbres fruitiers, se partagent par moitié entre le propriétaire
et le métayer, comme toutes les récoltes.
Toutefois, cette règle a dans la pratique quelque
tempérament : doivent être partagés les fruits qui, par leur destination, ont le
caractère de récoltes, comme, par exemple, les pommes et les châtaignes qui
constituent le principal revenu des terres dans certaines parties du pays
basque.
Le métayer n’a pas, en général, à partager les fruits que
produisent les arbres plantés dans son jardin. Le plus souvent, les arbres
fruitiers morts déracinés par accident appartiennent au colon partiaire, à la
charge, par lui, de les remplacer.
Quelquefois, les produits des arbres fruitiers ne sont pas
partagés à moitié : le maître a les deux tiers des fruits ; cette dérogation
s’explique par le peu de travail qu’exige la culture des arbres fruitiers.
Les bois-taillis ne sont jamais mis en métayage, parce qu’il
pousse sans le travail de l’homme. Mais le métayer peut quelquefois être chargé
de leur surveillance; on lui concède pour cette surveillance le droit d’enlever
le bois mort. Il est souvent autorisé à couper quelques pieds d'aulne ou de
châtaignier pour réparer les clôtures ; mais il ne lui est jamais permis de
couper un arbre de haute futaie ou de l’é téter
5°Clôtures,Haies et fossés.
Le métayer est tenu de curer les fossés et d’entretenir les
clôtures.
Le curage des fossés, indispensable pour l’assainissement
des terres, donne à l’agriculture un excellent engrais. Les boues, le limon et
des herbes retirées du fossé, sont superposés dans un coin de champ est répandus
sur la terre après fermentation.
Les haies sont sèches ou vives.
Les haies sèches ( clôture dite
de la Gironde ou fil de fer galvanisé, ou simples piquets tressés d’aubépine
noire) présentent l’avantage d'occuper moins de place, mais ont, dans nos métairies,
le plus souvent dénuées de bois de chauffage, l’inconvénient de ne rien produire.
Les haies vives sont de deux sortes.Les premières haies d'aubépine blanche, doivent être taillées tous les ans dans une métairie bien
tenue. De cette façon, la sève n'ayant plus de branches hautes à entretenir, se
répand dans les branches latérales de l'arbuste , et, les développements, donne à
la haie plus de consistance et moins de jours. Les branches supérieures, abattues
chaque année et trop frêles pour entretenir le foyer, servent, dans le pays
basque, à chauffer le four où, dans chaque maison, on fait cuire l’artophila,
pain de maïs.
Les secondes haies vives sont un composé de charmes, de houx,
d'osiers,de saules, où s’entrelacent et s’entrecroisent des ronces.Ces haies sont le plus
ordinairement émondées tous les trois ou quatre ans par tiers ou par quart , de façon à
ce que le métayer ait chaque année un stock de bois de chauffage. Le métayer,
qui, l’année de son départ et par un sentiment peu louable, et émonderait toutes
les haies de manière à ne pas laisser de bois à son successeur, n’agirait pas
en bon père de famille et s’exposerait à des poursuites en dommages-intérêts
(...)
7° Dettes du métayer.
La vente et l’achat des bestiaux suppose un roulement de
fonds, et la situation du tiers acquéreur ou vendeur est souvent intéressante.
Un exemple va nous suffire :
Piarrès vend une vache à Manech, métayer de Martin ; la
vache est livrée et non payée ; elle meurt et, par conséquent, ne peut être pris
en cas de non-payement.
À qui doit s’adresser Piarrès pour obtenir le payement ?
Peut-il s’adresser à Martin, le propriétaire, alors que Manech, le métayer, est
insolvable, et qu’il a uniquement traité avec lui ?
Si le bail à métairie était
un contrat de société, la question serait vite tranchée : le propriétaire
Martin serait tenu devrait payer sa part.
Mais le bail à métairie n’est pas une société ; bien qu’il
s'en rapproche beaucoup ; il tient aussi au contrat de louage, et, dans
l’hypothèse du louage, le bailleur n’est évidemment pas tenu des dettes du
preneur.
Il est toutefois équitable de supposer que, en passant un
marché avec le métayer, le vendeur avait dans la pensée la garantie du
propriétaire, et n’aurait pas livré à crédit, s’il n’avait entrevu la bourse de
ce dernier.
Nous estimons que le propriétaire pourra être poursuivi, non
pas pour le tout, mais pour sa part, avec cette restriction que, ayant à lui
seul le droit de direction, il échappera au payement en prouvant que l’achat
a été fait sans son autorisation ou son consentement.
En résumé, pour résoudre toutes les difficultés relatives à
la dette sociale, il ne faut pas perdre de vue que, si le bail à métairie peut,
à certains points de vue, être assimilé au contrat de société, à d’autres au
contrat de louage, le propriétaire conserve toujours le droit absolu de
direction : il sera toujours prudent de ne traiter avec un métayer qu’après
s’être assuré des dispositions du maître
8°Contributions
L’impôt des
portes et fenêtres, la contribution personnelle, la contribution mobilière, les
prestations en nature exigées par la loi de 1836 pour l’entretien des chemins
vicinaux, sont à la charge du métayer.
Quant à la contribution foncière, les auteurs ont émis diverses opinion.
Dalloz, Méplain soutiennent que la contribution foncière
doit être supportée par moitié par le maître et le métayer.
La contribution foncière, disent-ils étant une charge de la
jouissance, doit être supportée par la société qui profite de cette jouissance.
D’autres mettent l’impôt foncier à la charge exclusive du
propriétaire.
Nous n’allons pas suivre ces auteurs dans leur discussion
car cette question ne peut guère soulever de difficultés dans la pratique. En
général, dans le Pays basque, la contribution foncière est supportée par le
propriétaire .
(...)