Précisions sur Bayonne sous Vichy et l’occupation : le détour par Agen _Contenu N°4

Correspondance entre Émile Roubertie  et André Besson

dit "Besson-Rapp" du Service de police des Sociétés Secrètes

AD 47 -1738 W 81- Dossier N°837

Contenu N°4

Émile Roubertie a été en relation avec Besson-Rapp,délégué régional du Service de police des Sociétés Secrètes.

Au domicile de cette figure de l'ultra collaborationnisme, quelques originaux de la correspondance avec Roubertie seront retrouvés.Et dans la maison de l'ancien procureur de la République à Bayonne,une liste nominative de 296 personnes ayant appartenu ou appartenant à une loge maçonnique de Limoges,ville natale de Roubertie.

Besson-Rapp sera également impliqué dans la division Brandebourg,au sein de laquelle servira le bayonnais Lesgourgues.

 

 

Bayonne ,le 28 avril 1945

18me Région
Le Commandant du Sous-Secteur et Commandant d’Armes de BAYONNE

Le Chef du 2 ème Bureau de l’État-major du Sous-Secteur de Bayonne

A Monsieur le Juge d’Instruction BAYONNE

J'ai l'honneur de vous Communiquer, bien tardivement, ce dont je vous prie de bien vouloir m'excuser,sous ce pli, les pièces qui nous ont été remises par un officier du 2e bureau F.F.I. de BORDEAUX en Novembre ou Décembre 1944 et qui concernent M.ROUBERTIE.

Elles ont été saisies lors d'une perquisition opérée au domicile de Monsieur BESSON RAPP  à POUILLON.Ce Monsieur, sur lequel nous n'avons eu que peu de renseignements, était délégué régional du P.P.F. et de la L.V.F .,du S.S.S etc.

Selon   ce qui nous a été dit, il serait parti avec les Allemands peu avant la Libération et nous ignorons s'il a été arrêté depuis

Le chef du 2^ème  Bureau

Complément du blog :

P.P.F._ Parti Populaire Français
L.V.F._Légion des Volontaires Français contre le Bolchévisme
S.S.S _Service des Sociétés Secrètes

Pouillon le 19 juin 1942

Monsieur,

J’ai bien reçu votre lettre du 18 et les deux notes jointes dont je vous remercie.

Je vous serais obligé de vouloir bien, dorénavant, comme tous mes correspondants, signer vos lettres d'un pseudonyme, mais les signer pour éviter un quiproquo possible.

J'ai vivement regretté ,moi aussi, croyez-le bien,de n’avoir pas pu rester plus longtemps avec vous hier.Lors de mon prochain passage à BAYONNE,je prendrai mes dispositions pour avoir plus de temps à vous consacrer et je vous préviendrai en temps voulu de mon arrivée.

Veuillez agréer,Monsieur,l’expression de mes sentiments très distingués.

P.S.-Pour me faire connaître le pseudonyme que vous aurez choisi , envoyer moi un simple mot dans lequel vous me direz seulement : «  J'ai eu des nouvelles  de ….(votre pseudonyme ) ;il se porte bien et compte vous aller voir prochainement. »Et signer .

 

Pierre Massy pseudonyme d’Émile Roubertie 

Pierre deuxième prénom de Roubertie;Émile Pierre Noël 

Massy ,nom de jeune fille de sa mère Marie Élisabeth Noémie

Dans son ouvrage Bordeaux 1940-1944, René Terrisse,indique page 90:

André Besson se lance alors dans la prospection du département des Landes,à la recherche d'informateurs. (...)

"Dès juillet 1942,le réseau SRAM est à même de fonctionner dans le Sud-Ouest,récoltant de nombreux rapports signés "Arnault", "Bonnefont", "Canterrane", "Daniel", "Gaby", "H.B", "Hector", "Henry", "Jaf","J.P.","Lafeuillade","Legrande","Massy","Mesnil","Raymond",""Trémol","22",pseudonymes derrières lesquels se dissimulent des médecins,des notaires,des avocats,des professeurs de faculté ,et quelques officiers fidèles au régime et violemment antimaçonniques,tous informateurs bénévoles.

René Terrisse "Bordeaux 1940-1944" Librairie académique Perrin 1993 ISBN 2-262-00991-0

Complément du blog :
SRAM:service de recherche antimaçonnique.

Pouillon le 28 juillet 1942

André BESSON-RAPP

A Monsieur ROUBERTIE
Procureur de la République
A Bayonne (B.P.)

Cher Monsieur,

À la suite d'une lettre que j'avais écrite au sujet des « indésirables » de BAYONNE ,on me demande de PARIS un rapport sur le commissaire spécial DUNY.(1)
Je vous serais très obligé de vouloir bien me fournir les éléments de ce rapport avec toutes les précisions désirables pour qu'il soit efficace.
Pouvez-vous me donner également quelques renseignements précis sur PLUMONT (2) ?
Veuillez agréer cher monsieur l'expression de mes meilleurs sentiments 

Complément du blog:
(1) Commissaire spécial DUNY Jean _Renseignements généraux_

(2) PLUMON Eugène Edouard Jules,
interprète ,éditeur dont le petit guide « Ce qu’il faut savoir de l’armée allemande »
1 allée Dominique Morin à Biarritz.Billet du blog
 

fiche matricule militaire AD 59 Bureau de Lille classe 1900 _ 1R 2642_matricule 1841 vues 503 et 504/732
Cour de justice des Basses Pyrénées Pau 30 W 169

 

Pouillon le 16 novembre 1942

André BESSON-RAPP
A Monsieur ROUBERTIE
Procureur de l’Etat Français
A BAYONNE (B.P.)

Cher Monsieur,
J'ai bien reçu votre lettre du 1 er novembre .

Je compte aller prochainement à BAYONNE pour prendre officiellement contact avec le Sous-Préfet ; mais ne m'attendez pas pour me remettre les renseignements que je vous ai demandés ; envoyez les moi, je vous prie le, plus tôt possible, même s'ils ne sont pas complets, car PARIS me  les réclame d'urgence.Nous les complétons plus tard.

Veuillez agréer cher monsieur l'expression de mes sentiments distingués

 

Liste des différents membres ayant appartenu pour la plupart appartenant encore à la loge maçonnique « Les Artistes réunis » à Limoges trouvée à Bayonne au domicile d'Emile Roubertie

9 feuilles dactylographiées sans indications:

• de l'émetteur

• sur les origines des renseignements

• de date d'établissement.A noter que Les Archives départementales de Haute Vienne sous la cote 185 W 1/150 Préfecture régionale de Limoges dispose d'une  Liste des Francs-maçons appartenant à la "Loge des artistes réunis" de Limoges, s. d. (1942) consultable seulement en salle de lecture.
  

La liste est structurée de la façon suivante:

• Numéro d'ordre de 1 à 296
  

• Liste de noms par ordre alphabétique 

• Prénom 

• Profession 

• adresse à Limoges ou autres localités complétée le cas échéant par une observation ;vénérable,femme institutrice,radié,a été refusé,décédé.

Conjointement à cette liste nominative,l'existence d'une laconique notice individuelle se rapportant au commissaire de police PAPI Henri ,franc-maçon.Par convictions personnelles ou en mission d'infiltration? 

(3
Complément du blog
PAPI Henri Fortuné
né le 12 juillet 1898 à Rochefort (Charente-Maritime)AD 80 fiche matricule militaire 1R1143 Matricule 1474 classe 1917 (1918)
AD 13 fiche matricule militaire 1R 1434 Matricule 1474_ 5 vues

 André Besson dit "Besson-Rapp"

André Joseph Casimir Besson est né le 8 mars 1892 à Combleux ,près d'Orléans et décédé au Puy (Haute Loire) le 13 septembre 1954. 

Il est le fils de Jules Besson instituteur public,et de Jeanne Marie Rapp,

Source: AD 45 Combleux, Naissances : registre d'état civilEC 109444

 

Employé de banque puis militaire de carrière dans les troupes coloniales.Sa fiche matricule militaire est visible sur le site internet des AD 45

1912 1912 1 R 78204_Vues 180 à 183/214

Corps des volontaires français (CVF)formation militaire "concurrente" de la Milice Française

Source:

Les français sous le casque allemand Europe 1941-1945 par Pierre Philippe Lambert et Gérard Le Marec_1994 Éditions Grancher

 

 

"Les premiers partisans de Besson suivent à l'été 1943 une formation militaire dispensée par les cadres de la 8 e Cie Brandebourg aux Eaux-Bonnes." 

Pages 236-237_547

Police des temps noirs France 1939-1945 de Jean-Marc Berlière_2018 éditions Perrin

Précisions sur Bayonne sous Vichy et l’occupation : le détour par Agen _Contenu N°3

Témoignages en faveur de l'ancien procureur de la République 

à Bayonne (1941-1944) 

Extraits

 AD 47 -1738 W 81- Dossier N°837

Contenu N°3

Le juge instruit à charge et décharge.La sincérité de plusieurs témoignages ne semble pas devoir être remise en cause.Par contre,les déclarations relatives aux dissimulations d'armes à feu ,si elles étaient  exactes,constituaient une opération à haut risque.Deux personnes, ont été fusillés à la citadelle de Bayonne pour détention d'armes.   

Roubertie a fait libérer plusieurs personnes qui avaient été arrêtées par les allemands ou a évité de telles arrestations.

1_Jxxx Lucien inspecteur de police à Bayonne

 « je ne puis que remercier Roubertie de ce qu’il a fait pour moi.En effet,j’avais été arrêté par les allemands le 13 septembre 1943.C’est sur sur son intervention que j’ai été libéré le 20 décembre »

2_Hxxx Pierre greffier du tribunal de Saint-Palais

« Je sais d’autre part,qu’il fit tout son possible pour obtenir la libération de une cousine germaine»

Lepointe Ralph,vice-président du tribunal de Bayonne ,sévère sur certains aspects du dossier reconnait   « Il est indiscutable que dans certains cas,M.Roubertie est intervenu pour des français et parfois sur ma demande comme pour le greffier du tribunal de Saint-Palais… »

3_Capitaine Axxx

"Il ressort de la déposition du sieur Réal Del Sarte (1) que grâce à Roubertie, Del Sarte a fait libérer des prisonniers politiques notamment le capitaine Axxx qui avait été arrêté à sa descente du train à Bayonne et dont la situation militaire rendait difficile les interventions en sa faveur."

(1) Maxime Réal Del Sarte,militant d'extrême droite,sculpteur mutilé,admirateur de Jeanne d'Arc.

Le témoin précise que les personnes libérées grâce à Roubertie appartenait à toutes les nuances politiques.Il ajoute que lorsque Roubertie intervenait en faveur de communistes il disait au témoin qu’il ne fallait en parler à personne,qu’ils étaient français comme les autres.

D’autre part Mme Axxx,mère du capitaine Axxx précise qu’après l’arrestation de son fils elle est allée trouver Roubertie qui lui a donné l’assurance qu’il allait s’occuper de son fils.Quelques jours après,ce dernier était libéré.

4_Famille Gxxxx dont le général

Roubertie a prévenu la famille Gxxx qui avait déjà été arrêtée puis relâchée ,qu’une 2eme arrestation allait peut être opérée par la Gestapo.

Mme Gxxx déclare

Ayant déposé une plainte contre notre dénonciateur M.Roubertie alors P.R. à Bayonne,fut saisi par les services de la police allemande d’une demande de renseignements à notre sujet à la suite de quoi il nous prévint qu’une 2eme arrestation était susceptible d’être faite par la Gestapo,et à la suite de cet avertissement nous primes des précautions pour empêcher d’être à nouveau repris.

Mr Gxxx déclare

J’ajoute que par la suite M.Roubertie a usé de tout son pouvoir pour châtier avec rigueur mon dénonciateur

5_Pxxx Paul avocat

« Le 24 avril 1944,j’étais arrêté à mon domicile par les allemands qui après interrogatoire à Mont Carmel m’incarcèrent à la Villa Chagrin….C’est grâce à l’intervention de M.Roubertie que j’ai été libéré.(…)

6_De Axxx avocat général en retraite

Roubertie a évité au prénommé d’être évacué de Bayonne

Dans une autre occasion j’ai pu apprécier la conduite de M.Roubertie.C’est au moment où il était question d’évacuer de Bayonne les gens qui n’avaient pas de profession.Je vins trouver MM.Roubertie et Darroze et M.Roubertie me dit de m’adresser de sa part au commandant Poly qui était chef de la Garde Civique au quartier Marracq où je demeurais.J(ai suivi ses conseils ,le commandant Poly m’inscrivit dans la Garde Civique ce qui me permit d’éviter un départ.En résumé je n’ai eu qu’à me louer de l’attitude de M.Roubertie.

7_M.Darmaillacq vice président du tribunal correctionnel de Bayonne

Le sieur Axxx Bernard,substitut à Bayonne,précise (…) Une femme Mxxx était poursuivie devant le Tribunal correctionnel de Bayonne.Il ressortait du dossier que cette femme Mxxx avait dénoncé aux allemands des français.M.Darmaillacq vice président n’avait pu s’empêcher en termes d’une réelle imprudence de lui exprimer son mépris.La femme Mxxx avait immédiatement rapporté ces faits aux allemands qui avaient décidé d’arrêter M.Darmaillacq .M.Roubertie malgré que la plus grande inimitié le séparait de M.Darmaillacq n’avait pas hésité à intervenir auprès des allemands garantissant que M.Darmaillacq était incapable d’avoir prononcé les propos dont on l’accusait.Étant donné la date des faits,juin 1944,il ne fait pas de doute que grâce à M.Roubertie,M.Darmaillacq a évité d’être ne pas simplement arrêté mais déporté en Allemagne »

7_Fxxx Jean

Par l’intermédiaire de Roubertie,le susnommé désigné par les allemands pour partir en Allemagne,a pu y échapper.

M.Fxxx précise « j’ai été réfractaire au travail obligatoire en Allemagne.Il est exact que par l’intermédiaire de M.Roubertie je suis entré au tribunal civil de Bayonne où j’ai travaillé jusqu’à la Libération jusqu’à mon entrée au greffe je me cachais.

8_dame Cxxx née Hxxx

Roubertie conseilla utilement la dame Cxxx à qui les allemands voulaient faire porter l’étoile jaune et fermer le magasin (…) »Mon père était catholique tandis que ma mère était de race juive.Je figurais sur la liste des juifs que la Sous-Préfecture avait remis aux allemands.

Un officier allemand me dit que  je devais porter l’étoile jaune.Une de mes belles-sœur s’adressa alors à M.Roubertie pour essayer de le faire agir en ma faveur et celui-ci lui répondit que je ne devais pas être considérée comme juive.Il déclara que je ne devais pas accepter cette décision et m’offrit d’envoyer mon dossier au Commissariat des Affaires Juives à Paris.

Le service juif allemand à Bayonne ordonnait entre temps la fermeture de mon magasin (…)

Phrase illisible Nous suivîmes ses conseils et mon magasin fut rouvert le 1.8.43

9_M.Roubertie s’efforçait de sauver des allemands les jeunes gens arrêtés pour tentative de franchissement de la frontière.

C’est ainsi que déclare M.Bxxx juge (…) »M.Roubertie m’a demandé plusieurs fois de leur accorder le sursis afin qu’ils puissent sortir de suite avant que les allemands ne les saisissent. »

 (...)

2° Roubertie a dissimulé des armes dans son cabinet pour les soustraire aux allemands.C’est ce qui résulte des dépositions de

1)      X Fernand Président de chambre honoraire

« Celui-ci (Roubertie) m’a spontanément offert de cacher cette arme dans son cabinet.Devant son insistance j’avais accepté .J’avais fait un paquet de mon arme et je le portai à M.Roubertie qui pendant toute l’occupation cacha cette arme dans son cabinet .Après la Libération,je rentrai en possession de mon arme.

2)      De Axxx (…)

Ayant d’autres armes et  craignant qu'elles subissent le même sort, je suis allé trouver M.Roubertie  et je lui ai dit « via un scellé dans l'affaire de  De A xxx veuillez le déposer au greffe »M.Roubertie m'a répondu « si on le met au greffe les Allemands le prendront comme ils l'ont fait à Bordeaux, je vais le garder dans mon cabinet et vous le reprendrez après la libération.Il place sous le classeur de son bureau les armes en question et après la libération ,M.Poulhazan qui remplissait alors les fonctions de P.R. m’a restitué ces armes. » armes

 M.Bxxx juge résidant au tribunal d’Oloron déclare

« M.Roubertie n’admettait pas que les Allemands puissent arrêter le cours de la justice et il s’insurgeait avec autant de _mot illisible_que de fermeté contre leur ingérence .Il s'indignait  particulièrement de ces interventions lorsqu’elles intervenaient à la suite de démarches françaises(…)"

M.Mxxx Pierre,juge suppléant à Bordeaux précise

(…) Dans un réquisitoire  très sévère il a flétri l’attitude des français qui n’hésitaient pas à se mettre sous la protection de l’occupant pour tenter d’échapper à la justice de leur pays.(…)

Les affaires de trafic de devises étaient assez fréquentes au Parquet de Bayonne.J’ai eu connaissance d’une lettre violente des autorités allemandes menaçant M.Roubertie d’arrestation pour ne leur ainsi pas communiqué un dossier de cette nature »

 

Dxxxx Suzanne steno au Parquet _5/7/1945

"Bien que monsieur Roubertie ait toujours fait preuve de sentiments collaborationnistes, il a toujours défendu les prérogatives du Parquet contre les empiètements allemands sur les affaires, et bien que sachant que tout le personnel du Parquet avait des sentiments opposés aux siens nous n'avons jamais été inquiétés."

Précisions sur Bayonne sous Vichy et l’occupation : le détour par Agen _Contenu N°2

Bayonne:Mgr Vansteenberghe entre le 

14 mars et 10 décembre 1943

AD 47 -1738 W 81- Dossier N°837

Contenu N°2

Dimanche 14 mars 1943,en la cathédrale Sainte-Marie de Bayonne ,Mgr Vansteenberghe a prononcé un sermon évoquant la fleur de la jeunesse ,qui ne demandait qu'à travailler pacifiquement sur son sol,(...) est arrachée pour être à son tour déportée en pays lointain".

La parole discordante de l’évêque a porté au delà de la cathédrale.

Le dossier de l'ancien procureur de la République de Bayonne,devant la Cour de justice de Lot et Garonne, aborde cette affaire.

L’évêque décèdera subitement le 10 décembre 1943.Des militants bayonnais du Parti Populaire Français lui garderont du ressentiment ,comme en témoigne cet extrait d'un article de Ralph Soupault dans le journal Le cri du peuple de Paris N°1.183 Jeudi 13 juillet 1944_Vendredi 14 juillet 1944.
La France de Doriot
Avec les militants de Bayonne-Biarritz

« Têtes froides et cœurs chauds »

« J'apprends à connaître l'humour très particulier de nos amis qui n'hésitèrent  un jour à inscrire sur les murs de la cathédrale, dont l'évêque s'était trop distingué par un zèle un peu stalinien « Camarades et sympathisants communistes, venez tous dimanche au sermon du camarade évêque qui vous donnera les dernières directives de Moscou . »

 

Déposition faîte par le Père Fxxx,demeurant à Bayonne,Couvent des Capucins,recueillie le 4 octobre 1944 

« Au mois de mars dernier Monseigneur l’Évêque de Bayonne fit un sermon contre la déportation en Allemagne.Le lendemain,je rencontrai M.ROUBERTIE,qui vint à moi pour me dire combien il était écœuré ,indigné  et que tout Bayonne était scandalisé du sermon de la veille.Lorsqu’il eut bien parlé,je pris la défense de Monseigneur et de la doctrine qu’il avait adoptée.Je sus que M.ROUBERTIE avait interprété ma défense de l’Évêque comme un acte de gaullisme.A Lourdes,Monseigneur CHOQUET évêque de cette ville ,m’apprit que M.ROUBERTIE avait voulu faire arrêter l’évêque de Bayonne à 
cause de ce sermon contre la déportation.(…) ».

Explications données par Roubertie 15 novembre 1944

« Les déclarations du père Fxxx sont inexactes et tendancieuses.Voici un résumé de ces faits.
J’ignorais le discours qu’avait pu prononcer l’évêque de Bayonne en mars 1943.Le lendemain matin,je fus mis au courant par les journalistes,notamment M.Jxxx de la Gazette et plusieurs autres personnes,de l’attitude prise par l’évêque contre les mesures édictées par le Gouvernement  Français pour la relève.L’évêque de Bayonne avait ému les familles en disant notamment qu’en Allemagne on endoctrinait les jeunes gens et qu’ils n’auraient pas la faculté de pratiquer leur culte.Ce sont là des contres vérités absolues,la liberté de culte étant entière et les associations pieuses étant tolérées.Les déclarations de l’évêque de Bordeaux sont absolument contraires à celles de l’évêque de Bayonne.Devant un incident qui avait soulevé une telle émotion ,il était de l’exercice  de mes fonctions  de faire une enquête et d’en transmettre les résultats à mes chefs de Cour.Je charge donc,non pas le Commissaire de Police mais le Commissaire aux renseignements généraux (ce qui indique bien qu’il s’agissait uniquement  d’avoir des renseignements) de me donner tous renseignements sur cette affaire.Je reçu peu après un rapport accompagné d’un résumé du discours donné par le secrétariat de l’évêché.J’ai fait un rapport à ce sujet au Parquet Général de Bordeaux.Il existe à ce sujet un dossier à mon Parquet où se trouvent toutes les pièces car il eu,du temps de l’ancien évêque trois affaires le concernant.Je serai désireux que ce dossier soit versé intégralement  dans le mien ;on y verra que,non seulement ,je n’ai jamais eu dans l’esprit l’idée absurde de faire arrêter l’évêque ,mais qu’alors les services de PAU (information) demandaient des poursuites pour une affaire de presse,j’ai insisté pour un classement,idée à laquelle on a fini par se rallier.J’ai estimé qu’un évêque était un citoyen comme un autre,n’ayant pas le droit de combattre en chaire ,des mesures gouvernementales.Je n’ai fait que suivre en cela ,les doctrines de séparation des pouvoirs qui sont l’essence même des principes républicains.Les Allemands avaient pris l’incident au tragique ;je m’en suis entretenu avec M.de WALLWITZ,de la Kommandantur,capitaine attaché au Général et je lui ai facilement démontré qu’une action contre l’évêque  serait impolitique,particulièrement en pays basque.J’ai su par M.BONNELLI,attaché consulaire d’Italie,que l’incident avait été porté au Vatican.

J’ai toujours considéré que le père Fxxx m’était très hostile parce que je ne fréquente pas l’église et parce que ;le supérieur des capucins de Bayonne,muté depuis,ayant eu son frère poursuivi pour vol d’un portefeuille à Cambo,j’avais refusé de classer l’affaire,malgré les démarches du dit supérieur.

 

Déposition 17 mai 1945 Moreau Franck,avocat au barreau de Bayonne,Président du Comité de Libération à Bayonne.

J’avais appris de façon certaine que M.ROUBERTIE,alors procureur de la République,avait établi un rapport contre Mgr VANSTERBERGHE,évêque de Bayonne,à la suite du courageux discours que ce prélat avait prononcé à la Cathédrale au cours duquel il avait protesté contre les déportations.

Il m’avait été indiqué que M.ROUBERTIE voulait faire arrêter Monseigneur VANSTERBERHE.J’étais immédiatement allé voir l’Évêque de Bayonne auquel j’avais fait part de mes renseignements.Je dois dire que Monsieur VANSTERBERGHE n’en avait été nullement troublé,avait gardé toute sa sérénité et était prêt à supporter les conséquences des paroles par lui prononcées.

Il était de notoriété publique que M.ROUBERTIE faisait preuve de la plus grande animosité contre M.VANSTERBERGHE par suite de l’attitude nettement française de cet évêque.

 

Déposition du 26 mai 1945 de Georges Choquet,évêque de Tarbes et Lourdes

J'ignore complétement si le Procureur de la République de Bayonne a eu l'intention de faire arrêter Mgr Vansteenberghe.J'ignore tout de cette affaire.

Tout ce que je puis dire c'est que j'ai fait l'oraison funèbre de mon confrère et que j'ai fait allusion à certaines difficultés qu'il aurait eues avec l'armée d'occupation .

Mgr ne m'a fait aucune confidence au sujet des difficultés qu'il a pu avoir avec M. le Procureur de la République, difficultés dont j'ai vaguement entendu parlées par la rumeur publique.

lecture faite  persiste et signe avec nous et le greffier

 

Déposition 5 juillet 1945 Dxxxx  Suzanne sténo au Parquet-Palais de Justice.

« M.ROUBERTIE a été procureur à Bayonne d’août 1941 à aout 1944-pendant toute cette période où il a dirigé le Parquet de Bayonne il n’a cessé de croire et de souhaiter la victoire allemande et de manifester des sentiments favorables à la collaboration.

Il manifestait ses sentiments soit à l’occasion des articles de presse,soit à l’occasion des affaires locales.Il se réjouissait publiquement des victoire allemandes.J’ai l’impression d’ailleurs que M.ROUBERTIE considérait les Allemands comme seuls capables d’arrêter le communisme et que c’est pour cette raison qu’il souhaitait leur victoire.C’est ainsi qu’il a déclaré un jour au secrétariat que si la route de Berlin était coupée,malgré son age,il s’engagerait pour la défendre.Il était très partisan de la relève et aurait voulu que les français partent en masse pour activer le retour des prisonniers.

Mgr l’Évêque de Bayonne ayant prononcé un sermon à l’occasion du départ en Allemagne de la classe 42 dans lequel il s’élevait clairement contre ce départ et contre toute idée de collaboration avec les allemands,M.ROUBERTIE fit tout son possible pour sinon le faire arrêter du moins le faire déplacer.Les Allemands avaient d’ailleurs refusé de l’arrêter pour ne pas en faire un martyr aux yeux de la population.Lorsque Monseigneur mourut subitement quelque temps après,M.ROUBERTIE en nous apprenant la nouvelle au Secrétariat déclara « le camarade Évêque (1) est mort les communistes de la ville sont en deuil. » (…) »

(1) L’expression « camarade évêque » a été utilisée dans l'article  Ralph Soupault (Le cri du peuple de Paris N°1.183 Jeudi 13 juillet 1944_Vendredi 14 juillet 1944.)

Déposition du 06/07/1945 de Ralph Lepointe Vice- Président du Tribunal

(…) Tour à tour ,j'ai personnellement_terme manquant_ celui-ci déclaré que le plus beau jour de sa vie serait celui de la défaite complète des anglo-américains ; qu’en cas  de débarquement il prendrait un fusil pour s'opposer ;et qu'il fallait fusiller l'évêque lequel ,avait dans un prône ,parlé des travailleurs et employé le mot « déportés » que les révolutionnaires espagnols avaient bien fait de brûler leurs religieuses,etc,etc …On n’en finirait pas de reproduire des propos de pareilles espèces qui ont été quotidiennement tenu au Parquet(...)

 

Pour en savoir davantage

Le site internet Les Basses-Pyrénées dans la Seconde Guerre mondiale a mis en ligne le texte du  sermon prononcé le 14 mars 1943 par l’évêque de Bayonne rs partant en Allemagne.

La fiche matricule militaire d'Emile Roubertie ,accessible sur le site internet des Archives départementales de la Haute Vienne ,nous apprend deux choses:

Avant de bifurquer vers le droit,il a été étudiant ecclésiastique.

Il a été prisonnier de guerre du 29/8/1914 au 22/7/1917.  

 

AD 87 

501 1900 1 R 594 Numéro de matricule 657_Vues 206 et 207/689