24 septembre 2016

Petits "camps" de prisonniers à Hendaye;1940-1944

Entre les automnes 1940 et 1944, la ville d'Hendaye a été un lieu de captivité.

Sommaire: 

I- Travaux et fournitures effectués aux "camps  de prisonniers à Hendaye" pendant l'occupation allemande

II - 23 mars 1942:militaire de l'armée française, prisonnier de guerre ,victime d'un accident du travail en gare d'Hendaye

III - 30 mai 1944: militaire de l'armée française,prisonnier de guerre,tué au cours de son évasion 

IV -"Camps de prisonniers à Hendaye" à la Libération


Je remercie Yannick Renaud ,de la Librairie du Levant à Bayonne,pour le partage spontané des photographies représentant des militaires allemands cantonnés à Hendaye.
Vous trouverez sa carte professionnelle en bas de page.


I -Travaux et fournitures effectués aux "camps de prisonniers à Hendaye" pendant l'occupation allemande


Sentinelle allemande



Les Archives départementales des Landes conservent  quelques documents relatifs à des dépenses engagées pour le compte des troupes d'occupation à Hendaye .
Archives départementales des Landes _314 W article 218 Divers services_

N°23 au crayon rouge.Visé par le maire d'Hendaye.10 avril 1941
Mémoire présenté par Mr O.......,plâtrier demeurant à Hendaye 
"Camp de prisonniers" sans éléments de localisation
26  septembre 1940 et 17,18,18,19,20 décembre 1940.Divers travaux à l'intérieur d'une habitation

N°22 au crayon rouge.Visé par le maire d'Hendaye .18 avril 1941
Mémoire présenté par Mr U ......plâtrier demeurant à Hendaye,rue du pont,pour travaux et fournitures effectués pour les troupes d'occupation au camp de prisonniers ,route de Béhobie.
27 novembre 1940 et 21 janvier 1941

N°21 au crayon rouge.Visé par le maire d'Hendaye le 19 février 1942
Troupes d'occupation (camp des prisonniers rue du port)
MM.D.....et S ......entrepreneurs,place de la République à Hendaye


N°24 au crayon rouge.Visé par le maire d'Hendaye le 15 décembre 1941
Dernier trimestre 1941
Villa Duruty (Prisonniers) STALAG

N°25 au crayon rouge.Visé par le maire d'Hendaye le 23 janvier 1942
Mémoire présenté par Mr V......serrurier à Hendaye
Camp de prisonniers d'Hendaye sans éléments d'identification 

N°26 au crayon rouge.Visé par le maire d'Hendaye le 20 mars 1942
Mémoire présenté par Mr S....électricien à Hendaye ,pour travaux et fournitures effectués à la Villa Duruty,Camp des prisonniers

N°27 au crayon rouge
Document manuscrit.
Maison B.....avenue de la gare à Hendaye
Ordre N°1029
Camp de prisonniers de Duruty
23 verres simples et 1 verre semi double






Hendaye plage,,hôtel Régina.On distingue également en arrière-plan une extrémité du casino style mauresque
Hendaye

II - 23 mars 1942,militaire de l'armée française, prisonnier de guerre ,victime d'un accident du travail en gare d'Hendaye

Source:Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques , site de Bayonne,cote  1027 W art 13 Tribunal de Grande Instance de Bayonne

Précision du blog Retours vers les Basses-Pyrénées:la différence d'écartement des rails entre les réseaux espagnols et français imposaient en gare d'Hendaye ,des opérations de déchargement /chargement des marchandises.

PROCÈS-VERBAL de RENSEIGNEMENTS sur un accident du travail ,survenu à la gare d'Hendaye.
Victime:Soldat Sénégalais du camp de prisonniers de Hendaye (B.P)

Ce jourd'hui vingt trois mars mil neuf cent quarante-deux,à douze heures.

Nous soussignés G.....,Edouard et D......,Marc
gendarmes à pied à la résidence d'Hendaye,département des Basses-Pyrénées,revêtus de notre uniforme et conformément aux ordres de nos chefs,étant à notre caserne,avons été prévenus par Mr le Chef de gare d'Hendaye,qu'un prisonnier de guerre Sénégalais,qui travaillait sous la surveillance de sentinelles Allemandes au transbordement de marchandises à la gare internationale d'Hendaye ,(voie 12),venait d’être comprimé entre le paroi d'un wagon espagnol et le montant de la porte amont de la halle d'exportation.Ce blessé qui portait diverses blessures aux mains et au visage ,se plaignait également de contusions du thorax.
Nous nous sommes immédiatement rendus sur les lieux et nous n'avons pu ,sur l'heure,procéder à aucune constatation.Les divers ouvriers qui,au cours de la matinée travaillaient aux abords immédiats du lieu de l'accident,avaient cessé le travail à 12 heures,pour le reprendre à 14 heures.Le wagon espagnol avait également été enlevé de la voie 12 et placé sur une voie de garage.
A 14 heures,les ouvriers étant revenus à leur travail,nous avons sur leurs indications procédé aux constatations suivantes:
L'accident s'est produit sur la voie 12,(voie espagnole),à la porte Nord de la halle d'exportation.Cette porte mesure 3m70 de large,la voie 1m80 et les wagons espagnols 2m90.
Au passage d'un wagon à la porte de la halle d'exportation,il existe un passage de 0m40  de large,entre le paroi du wagon et le montant de la porte.
Nous avons ensuite procédé à une enquête et les deux témoins civils de l'accident,(tous deux de nationalité espagnole),nous ont respectivement déclaré:
1° DANJOU,François,16 ans,manœuvre,demeurant rue d'Aispurdi à Hendaye:
"Ce matin j'ai pris mon travail,à la gare internationale,à 8 heures,en compagnie de GASTESI,Joseph.Vers 8h30 huit prisonniers Sénégalais sont venus se joindre à nous et nous avons travaillé toute la matinée ensemble.
Vers 11 heures,nous avons du sortir de la halle couverte un wagon espagnol chargé de bidons d'huile pour le placer devant le quai découvert.A cet effet,les huit soldats,GASTESI et moi,nous nous sommes placés sur les cotés et le derrière du wagon pour le pousser à la main.Au moment où l'arrière du wagon est arrivé à hauteur de la porte de sortie de la halle,j'ai aperçu un soldat chanceler et tomber à terre.J'ai aussitôt compris qu'il venait de se faire coincer entre le montant de la porte et le paroi du wagon.

Ce militaire qui portait des blessures à la main gauche et à une cuisse,se plaignait également de contusions du thorax.J'ignore la gravité de ses blessures et à mon avis il a été victime de son imprudence ou de son inattention.Je ne puis vous dire exactement dans quelles conditions l'accident s'est produit,car je poussais le wagon par l'arrière et le Sénégalais sur le coté droit,(direction de marche).
Les prisonniers travaillent tous les jours avec nous et chaque équipe est surveillée par deux sentinelles."
Lecture faite,persiste et signe.

2° GASTESI,Joseph,53 ans,transbordeur,demeurant rue de la Fontaine à Hendaye:
"Ce matin,j'ai travaillé à la gare comme d'habitude,en compagnie de DANJOU,François et huit prisonniers Sénégalais.Vers 11 heures,nous avons été obligés de déplacer à la main,un wagon espagnol afin d'effectuer son déchargement.Quatre soldats,DANJOU et moi,nous nous sommes placés à l'arrière du wagon,pendant que les quatre autres soldats se plaçaient sur les cotés.En arrivant à hauteur de la porte de sortie de la halle,j'ai aperçu un soldat chanceler et tomber à terre.Il portait divers blessures aux mains,au visage et il se plaignait de contusions du thorax.
Un de ses camarades m'a dit qu'en poussant le wagon,il s'était trouvé coincé entre le paroi du wagon et le mur .Nous l'avons aussitôt placé sur un brancard et ses camarades l'ont transporté à la gare.
A mon avis cet accident est du à une imprudence ou à une faute d'inattention.Depuis longtemps déjà,ce prisonnier travaillait avec nous et l'équipe était placée sous la surveillance de deux sentinelles allemandes."
Lecture faite,persiste et signe
Cinq expéditions
La 1 ere à la Géri...-der-Feldkommandantur à Biarritz
La 2 eme à Mr le S/Préfet de Bayonne
La 3 eme à Mr le Procureur de la République à Bayonne
La 4 eme au Cdt de Section à Bayonne
La 5 eme aux archives.


 




III - 30 mai 1944: militaire de l'armée française,prisonnier de guerre, tué au cours de son évasion


Sources:Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques , site de Bayonne,cote  1027 W art 17 Tribunal de Grande Instance de Bayonne

PROCÈS-VERBAL de Renseignements,sur la découverte d'un noyé,prisonnier de guerre Nord Africain nommé:MOHAMED-BEN HAMED
Ce jourd'hui,deux juin mil neuf cent quarante quatre à seize heures trente.
Nous soussignés:P.....,Joseph,M.D.L.Chef et D....Marc,gendarme,à la résidence de Hendaye,département des Basses-Pyrénées,revêtus de notre uniforme et conformément aux ordres de nos Chefs;étant à notre caserne,nous avons été avisés par Monsieur le Maire de Hendaye,que le corps d'un noyé,venait d’être découvert au Pont International de Hendaye.
Nous nous sommes rendus aussitôt sur les lieux et,nous avons en effet constaté,que le corps d'un noyé flottait sous la première arche du Pont International.Ce corps était accroché à cet endroit à des fils de fer barbelés.
A l'aide d'une barque mise gracieusement à notre disposition,nous avons transporté ce corps,jusqu'au Port de Hendaye,ou,après l'avoir déposé sur la berge,nous avons constaté qu'il portait une blessure par arme à feu au bras droit et que l'os était complètement brisé.
Il était vêtu d'une chemise Kaki,d'un Pull Over marron,d'une culotte en drap kaki,chaussé de brodequins,il porte en outre des bandes molletières en drap kaki.Un calot en drap kaki est maintenu à sa ceinture à l'aide d'une courroie en cuir.
Nous avons fouillé les poches du noyé afin de l'identifier,mais aucune pièce d'identité n'a pu être découverte.Dans la poche droite de sa culotte,nous avons trouvé un portefeuille en cuir marron,contenant la somme de CINQ CENT CINQUANTE Francs.Le corps de ce noyé portant des effets militaires,nous avons conclu qu'il s'agissait d'un prisonnier de Guerre Nord Africain,cantonné à Hendaye.
En effet un des prisonniers ayant tenté de s'évader en traversant la Bidassoa à la nage le 30 mai 1944,des militaires des Troupes d'occupation de Service,avaient tiré sur lui.Des renseignements verbaux recueillis,ce prisonnier aurait coulé dans la rivière quelques instants après le coup de feu.
Monsieur le Docteur REBOUL,avisé par les soins de Monsieur le Maire,s'est rendu sur les lieux et à procédé aux constatations médicales.Ce praticien,nous a déclaré que la blessure du bras droit était faite par une arme à feu et que la mort était due au choc traumatique et à l’hémorragie ayant entrainé la noyade.Il nous a délivré un certificat médical,qui sera joint à la première expédition du procès-verbal.
Les prisonniers de guerre Nord Africains,ayant quitté Hendaye dans la journée,nous n'avons pu demander à ces derniers s'ils reconnaissaient le corps du noyé comme étant un de leur camarade ayant tenté de s'évader le 30 mai 1944.Plusieurs personnes se trouvant sur les lieux,n'ont pas reconnu non plus le corps de ce noyé.

Ce noyé étant certainement le prisonnier de Guerre Nord Africain ayant tenté de s'évader ,nous avons prévenu la Standortkommandantur locale de cette découverte et lui avons demandé la destination à donner à ce corps.Il nous a été répondu de le transporter à la Morgue d'Hendaye.
Les services des Pompes funèbres prévenus sont arrivés peu après sur les lieux munis d'un cercueil et la mise en bière du corps a été faite.Cette opération terminée le corps a été transporté à la morgue du cimetière d'Hendaye.
La Standortkommandantur locale ,n'a pas pu nous fournir le nom de ce prisonnier de guerre,mais des renseignements recueillis il s'agirait du sujet marocain ;MOHAMED-BEN-HAMED Matricule au Frontstalag N°44 265.
L'inhumation a eu lieu le 3 Mars 1944_  _ à 20 heures,au nouveau cimetière d'Hendaye,travée N°5 concession N°19.
La somme d'argent trouvée sur le cadavre nous a été réclamée par les autorités d'occupation pour etre transmise à la Croix Rouge Internationale .Elle a été remise contre reçu au Sergent Allemand HENSEL de la Standortkommandantur de Hendaye qui sera joint à la première expédition du Procès-Verbal.
Quatre expéditions destinées:la 1ere à Monsieur le Procureur de la République à Bayonne avec le certificat médical et le reçu de la Somme,la 2 eme à Monsieur le Sous-Préfet à Bayonne,la 5eme à la Standortkommandantur locale,la 4 eme aux archives.
Fait et clos à Hendaye les jour,mois et an que d'autre part.

Copie du certificat médical:
Je soussigné A.REBOUL docteur en médecine,certifie avoir examiné le 2 juin 1944,le cadavre d'un homme d'environ 30 ans,présentant une blessure par arme à feu ayant traversé le bras droit après éclatement de l'os.
La mort est due au choc traumatique et à l'hémorragie ayant entrainé la noyade immédiate.
Signé:REBOUL.
Le 2 juin 1944.

Reçu
Je soussigné :HENSEL,Sergent Allemand à la Standortkommandantur de Hendaye,reconnais avoir reçu de la brigade de gendarmerie de Hendaye,un portefeuille ,contenant la somme de CINQ CENT CINQUANTE francs,découverte sur le Sujet marocain MOHAMED-BEN-HAMED,prisonnier de guerre Nord Africain trouvé noyé le 2 juin 1944.

Hendaye le 5 juin 1944








 

 

IV -"Camps de prisonniers à Hendaye" à la Libération

 Source:Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques,site de Pau,cote 77 W art 14

Service des Renseignements Généraux Hendaye

Hendaye le 30 octobre1944
Les inspecteurs de Police:L......et B...... 
A Monsieur le COMMISSAIRE DIVISIONNAIRE à HENDAYE

Objet:A/S. du centre d'internement d'Hendaye
Réf:Note de M.le Préfet des Basses-Pyrénées N°1655 I.P. du 17/10/44

Nous avons l'honneur de vous rendre compte des résultats de l’enquête que nous avons effectuée suivant vos instructions,au sujet du camp d'internement d'IRANDATZ.
1°Le camp d'internement d'IRANDATZ est situé en bordure de la route de BEHOBIE et on y accède par la rue Santiago,
2°Les internés sont au nombre de 17 actuellement,et tous de nationalité espagnole,Plusieurs contingents de ces internés ont déjà été dirigés sur le camp d'internement de Jurançon à Pau,
3°La garde du camp est assurée par 9 sénégalais dont 1 sergent-chef et 1 sergent,tous détachés par le Commandement Militaire de la Frontière à Hendaye,
4°Le camp est constitué par une vingtaine de baraques en bois,Parmi ces bâtiments,est affecté un logement du corps de garde.Des baraques sont également prévues pour des salles de jeux,de désinfection,de douches et de réfectoire.
Le service médical est assuré par les médecins d'Hendaye qui sont appelés en cas de maladie d'un interné.
La nourriture est satisfaisante et assurée jusqu'à maintenant par le P.C. des F.F.I qui cependant se décharge de ce soin à partir du 1 er novembre 1944,
5° Ce camp a été installé par le Commandant Militaire de la Frontière et par la Sécurité Militaire pour recevoir les espagnols qui traversent clandestinement la frontière franco-espagnole depuis le départ des troupes d'occupation.
6° Les internés ne se livrent à aucun travail régulier en dehors de l'entretien du camp (barbelés,nettoyage etc...). Lorsque le nombre de ces internés est assez important,on nomme parmi eux un commandant responsable de ses hommes.
7°Dans l'ensemble les conditions de vie au camp d'IRANDATZ sont satisfaisantes.Les internés n'y restent d'ailleurs pas longtemps,étant évacués sur PAU dès que leur nombre permet la formation d'un convoi.
Il est à signaler d'ailleurs que le nombre de ces internés a sensiblement diminué depuis le renforcement par les troupes régulières de FRANCO.
Les inspecteurs de Police
Signé :L.....,B.....

N°746 .-Vu et transmis à Monsieur le PRÉFET,à Pau,suite à sa demande en date du 17/10/44

HENDAYE ,LE 30 OCTOBRE 1944
P/LE COMMISSAIRE DIVISIONNAIRE

P.S.Le camp d'IRANDATZ avait été construit par les allemands pour y loger la Division Bleue espagnole;les baraques sont très bien installées ,les couchettes sont en bon état,et il existe du chauffage dans chacune d'elles.

A propos de la Division Bleue

 La División Azul (la Division bleue en français, Blaue Division en allemand), était un corps de  volontaires espagnols créé par Franco et mis à la disposition  de l'Allemagne nazie pour combattre sur le front de l'est.Voir l'article Division Bleue -Wikipédia
Collection particulière
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