27 mars 2021

Dans les archives du tribunal de Bayonne,une affiche relative à l'organisation de la justice dans les territoires d'Alsace occupés par les troupes françaises

On trouve parfois aux Archives départementales, des documents se rapportant à une commune ou à un secteur géographique extérieur au département .Ainsi,dans les fonds du tribunal d'instance de Bayonne,une affiche datée du 5 octobre 1915, relative à l'organisation de la justice dans les territoires d'Alsace occupés par les troupes françaises.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

ADMINISTRATION DE L'ALSACE

Arrêté

Relatif à l’Organisation de la Justice en Alsace

Nous,LOUIS ERNEST de MAUD’HUY,

Général de Division,Commandant la VIIe Armée,Commandeur de la Légion d’Honneur,

Vu les instructions du Général Commandant en Chef en date du 26 Novembre 1914, relatives à l'organisation provisoire de la Justice en Alsace, instructions publiées dans les Communes du Territoire de THANN,le 23 Novembre 1914 et dans les Communes du Territoire de DANNEMARIE le 5 décembre 1914 ;

Vu les nouvelles instructions du Général Commandant en Chef en date du 28 septembre 1915, prises en exécution de celles du Gouvernement de la République Française ;

ARRÊTONS

Article I

Dans les territoires d’Alsace occupés par les troupes françaises les lois civiles et pénales antérieurement en vigueur demeureront applicables et les juridictions qui y existaient seront maintenues pendant la période d'occupation sous réserve des exceptions et modalités ci-après commandées par les circonstances.

Article II

Les dispositions des dites lois civiles et pénales qui serait incompatible avec le nouvel ordre de choses créée par l'occupation ou contraire à la sécurité des troupes françaises cesseront de s'appliquer.

A leur défaut,et à raison de l'impossibilité de les observer il sera fait application, le cas échéant, des dispositions correspondantes des lois françaises .

Article III

En matière civile,les tribunaux de bailliage continueront à rendre la justice dans les limites assignées à leur compétence par la législation demeurée en vigueur.En conséquence, ils connaîtront 1° de toutes affaires civiles, y compris les affaires commerciales, dont l'objet a une valeur n'excédant pas 600 marks (750 f.) ;2° sans limitation de valeur , des affaires civiles dont le jugement leur a été spécialement attribué, a raison de leur nature, par ladite législation.

Provisoirement, et jusqu à ce que l'appel de leurs jugements ait pu être assuré, ils statueront en dernier ressort sur toutes affaires visées au paragraphe précédent.

A titre également provisoire, et jusqu à ce que les tribunaux régionaux aient pu être établis, ils connaîtront des affaires relevant de ces tribunaux à l'effet d'ordonner, sans qu'il soit porté préjudice au principal, toutes mesures provisoires ou conservatoires.

Indépendamment de leurs attributions contentieuses les juges de bailliage conserveront les attributions de juridiction gracieuse qu'ils tiennent des lois restées en vigueur.Notamment , ils resteront chargés de la tenue des livres fonciers soit par eux-mêmes, soit par des délégués placés sous leur autorité et leur contrôle

Article IV

Conformément à l'article 1er la procédure devant les tribunaux de bailliage sera, en principe, régie par les lois en vigueur lors de l'occupation.

Ces lois s'appliqueront sous réserve tant des exceptions prévues à l'article 2 que des modalités suivantes :

Les tribunaux de bailliage pourront être saisis soit par requête écrite et signée du demandeur, soit par une déclaration verbale que recevra le greffier ; mais aucune citation à l'audience ne pourra être donnée sans qu’au préalable le juge de bailliage ait appelé les parties devant lui en conciliation ou qu’elles aient spontanément comparu à cette fin.

Il sera procédé à la notification des citations et à toutes significations soit par la poste au moyen de lettres recommandées, soit par la voie administrative selon ce qui aura été décidé par le juge.

ARTICLE V

En matière pénale les juges de bailliage connaîtront sans l'assistance d’échevins :1° des poursuites pour contraventions et délits sur lesquelles ils pouvaient déjà statuer seuls d'après les lois en vigueur lors de l'occupation ; 2°de celles qui d'après les dites lois devaient être portées devant les tribunaux d’échevins.

En conséquence, et par application de la disposition de l'alinéa 2 du paragraphe précédent relèveront provisoirement de la compétence des juges de bailliage jugeant sans le concours d’échevins :l 1° toutes contraventions c'est à dire toutes infractions punies de la détention simple (1) ou d'une amende de 150 marks (187,50f.) au maximum ; les délits punis au maximum d'un emprisonnement de trois mois ou d'une amende de 600 marks (750 f.)à l'exception de ceux qui ont été expressément soustraits à la compétence des tribunaux d’échevins  par les lois en vigueur lors de l'occupation ; 3° les délits dont la connaissance leur a été spécialement attribuée par ces lois et notamment les vols simples et abus de confiance lorsque la valeur de l'objet volé ou détourné ne dépasse pas 150 marks (187,50 f.).

Provisoirement et jusqu à ce que l'appel de leurs jugements ait pu être assuré, les tribunaux de bailliage statueront en dernier ressort sur toutes lesdites affaires.

Ne rentreront pas dans leur compétence les poursuites pour délits dont ils ne connaissent que sur renvoi ordonné par les tribunaux régionaux.

La compétence attribuée par le présent article aux tribunaux de bailliage en matière pénale ne  s’exercera que sous réserve, le cas échéant, de celle qui appartient en vertu du code français de justice militaire aux Conseils de Guerre aux Armées.

Provisoirement la compétence de ses conseils restera exclusive pour le jugement des délits et crimes qui relevaient des tribunaux régionaux et des cours d'assises

ARTICLE VI

Conformément à l'article 1er les lois en vigueur lors de l'occupation continueront, en principe, à s'appliquer, en matière pénale, devant les tribunaux de bailliage tant pour la procédure à suivre qu'en ce qui concerne les règles de fond relatives aux infractions, aux personnes punissables et aux peines.

Toutefois ,lesdites lois ne seront observées que sous réserve des exceptions prévues par l'art. 2 et des dispositions ci-après.

L'application des pénalités édictées par ces lois pourra être tempérée par l'admission de circonstances atténuantes atténuantes conformément aux dispositions de l'article 463 du Code pénal français et par le sursis à l'exécution dans les conditions déterminées par la loi française du 26 mars 1891.

En outre les contraventions aux règlements ou arrêtés pris en matière de police par l'autorité française depuis l'occupation seront punies des peines prévues par les articles 464 et suivants du Code pénal français .

ARTICLE VII

Les frais de justice resteront soumis aux lois en vigueur de l’occupation

ARTICLE VIII

Le présent acte sera publié et affiché dans toutes les communes des territoires d’Alsace occupées par les troupes françaises.

 

(1)Aux termes de l'article 18 du Code pénal en vigueur en Alsace « le maximum de la peine de détention simple est de six semaines, le minimum d'un jour.La peine de la détention simple consiste uniquement dans la privation de la liberté ».

 

Au Q.G.A.le 4 octobre 1915

 

Signé :DE MAUD’HUY.

St-Amarin_Imp Paul Ehkirch et Cie

 

Source :AD 64 3u 1 art.15 Tribunal de Première instance de Bayonne.

 

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